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Libération
Visite ou menace ?

«Il faut que cela change» : J.D. Vance dézingue le Danemark qui ne fait «pas fait un bon travail», et flatte le Groenland

Le numéro 2 américain a atterri ce vendredi 28 mars sur la seule base militaire américaine au Groenland, dans un contexte politique crispé, une visite vécue comme une provocation en raison des velléités d’annexion de Donald Trump. Ce dernier a répété en avoir besoin pour «la paix mondiale».
La base américaine de Pituffik, le 4 octobre 2023. (Thomas Traasdahl/Ritzau Scanpix. AFP)
publié le 28 mars 2025 à 9h16
(mis à jour le 28 mars 2025 à 20h27)

Une visite sous tension. J.D. Vance est ce vendredi 28 mars sur la base militaire américaine du Groenland, après que Donald Trump a réitéré une énième fois ses visées sur le territoire sous tutelle danoise. «Il nous le faut», a-t-il répété mercredi 26 mars. Le Danemark a obtenu une première petite victoire en conduisant le vice-président américain à renoncer à son projet d’aller à la rencontre de la «société groenlandaise». La visite se réduit désormais à la venue de J.D. Vance et son épouse Usha sur la base américaine de Pituffik, située sur la côte nord-ouest du territoire. Le vice-président y est «pour être informé des sujets liés à la sécurité de l’Arctique» et rencontrer les troupes, ont fait savoir ses services.

Le vice-président américain a critiqué le Danemark, qui n’aurait «pas fait un bon travail» au Groenland pour la sécurité internationale, devant les troupes américaines. «Vous avez sous-investi dans la population du Groenland et dans la sécurité de cette incroyable et magnifique masse continentale peuplée de gens incroyables. Il faut que cela change», a demandé J.D. Vance.

Après cette violente invective sur l’inaction supposée du Danemark, le même Vance a poursuivi : «Nous ne pensons pas que la force militaire sera jamais nécessaire. Nous pensons que les habitants du Groenland sont rationnels et (..) que nous allons pouvoir conclure un accord du style de Donald Trump, pour assurer la sécurité de ce territoire, mais aussi des Etats-Unis d’Amérique», a-t-il évoqué.

J.D. Vance avait déjà abruptement déclaré, début février, que «le Danemark ne faisait pas le travail au Groenland et n’était pas un bon allié». La base américaine constitue un avant-poste de la défense antimissile américaine, particulièrement contre la Russie, car la trajectoire la plus courte des missiles en provenance de la Russie vers les Etats-Unis passe par le Groenland. Pituffik, qui s’appelait Thule Air Base jusqu’en 2023, a servi de poste d’alerte contre d’éventuelles attaques de l’URSS pendant la Guerre froide et reste un maillon essentiel du bouclier antimissile américain. C’est aussi un endroit stratégique pour la surveillance de l’hémisphère nord et la défense de l’immense île arctique, que, selon l’administration américaine, les Danois ont négligé.

J.D. Vance «a raison de dire que nous n’avons pas répondu aux souhaits américains d’une présence accrue, mais nous avons pris des mesures pour répondre à ce souhait», relève pour l’AFP Marc Jacobsen, maître de conférences au Collège royal de Défense danois. Pour lui, les demandes américaines ont besoin d’être plus précises, s’ils souhaitent une réponse adaptée du Danemark. En janvier, Copenhague a annoncé qu’il allait consacrer près de deux milliards d’euros au renforcement de sa présence dans l’Arctique et l’Atlantique Nord. Le gouvernement prévoit notamment d’acquérir trois nouveaux navires spécialisés pour les régions polaires et deux drones à longue portée supplémentaires pour la surveillance. Il va en outre renforcer sa capacité satellitaire.

La population souhaite l’indépendance sans ingérence

L’appétence de Donald Trump pour le territoire de glace, qui fascine pour ses hypothétiques ressources minières et fossiles et son importance géostratégique, fait figure de repoussoir pour ses habitants et sa classe politique, ainsi que pour la puissance de tutelle danoise. Les Etats-Unis «savent que le Groenland n’est pas à vendre. Ils savent que le Groenland ne veut pas faire partie des Etats-Unis. Cela leur a été communiqué sans ambiguïté, tant directement qu’en public», a réitéré mercredi la Première ministre danoise Mette Frederiksen.

Si tous les principaux partis groenlandais sont favorables à l’indépendance du territoire à plus ou moins long terme, aucun ne soutient l’idée d’un rattachement aux Etats-Unis. La population, majoritairement inuite, rejette également toute perspective de devenir américaine, d’après un sondage publié fin janvier. La venue de J.D. Vance intervient au moment où le Groenland est en attente d’un nouvel exécutif suite aux élections législatives du 11 mars.

Au départ, la deuxième dame, Usha Vance, devait assister à une compétition de chien de traîneau. La présence sur le territoire du conseiller à la sécurité nationale Mike Waltz et du ministre de l’Energie Chris Wright, a également été un temps évoquée. «Notre intégrité et notre démocratie doivent être respectées, sans aucune ingérence extérieure», avait réagi lundi le Premier ministre groenlandais par intérim Mute Egede sur Facebook. Le gouvernement sortant a rappelé n’avoir «envoyé aucune invitation pour des visites, qu’elles soient privées ou officielles». Le déplacement éclair de Donald Trump Jr le 7 janvier avait déjà été vécu comme une provocation.

Mis a jour à 20 h 21 avec les déclarations de J.D. Vance depuis le Groenland.