La Cité des Anges rejoue des scènes apocalyptiques qu’elle n’avait plus vécues depuis la pandémie. Ses bouchons légendaires ont disparu et les habitants qui s’aventurent dehors portent souvent des masques, pour se protéger de l’air vicié par les fumées toxiques.
Assiégée par les flammes de plusieurs incendies depuis mardi, la mégapole américaine continue de compter ses morts : le bilan, qui faisait jusqu’ici état de 11 victimes, s’est alourdi à 16 morts, samedi 11 janvier dans la soirée. Mais il pourrait encore évoluer, des secouristes assistés de chiens renifleurs continuant d’inspecter dimanche les décombres, à la recherche de corps ou de restes humains.
Malgré les efforts de milliers de pompiers à pied d’œuvre, le «Palisades Fire» s’est étendu samedi au nord-ouest de Los Angeles. Il menace désormais la vallée densément peuplée de San Fernando, mais aussi le musée Getty et ses œuvres d’art inestimables.
Les soldats du feu ont bénéficié d’une accalmie des vents ces trois derniers jours. Mais les rafales doivent de nouveau forcir ce dimanche. «La situation est toujours critique», a averti Deanne Criswell, de l’agence fédérale de réponse aux catastrophes naturelles (FEMA). «Les vents risquent de redevenir dangereux», a-t-elle expliqué à la chaîne ABC, appelant la population à rester extrêmement vigilante. «Ces vents, combinés à un air sec et à une végétation sèche, maintiendront la menace d’incendie dans le comté de Los Angeles à un niveau élevé», a mis en garde Anthony Marrone, le chef des pompiers du comté.
Interview
Des évacués font face à un casse-tête pour se reloger avec un bond vertigineux des tarifs des locations. Samedi, le procureur général de l’Etat, a rappelé que le gonflement artificiel des prix est un «crime passible d’un an de prison et de 10 000 dollars d’amende».
Pour tenter de lutter contre les pillages dans les zones sinistrées ou évacuées, un strict couvre-feu, en vigueur entre 18 heures et 6 heures du matin a été décrété vendredi par les autorités dans les secteurs de Pacific Palisades et Altadena, les plus ravagés.
«Un examen indépendant complet»
De quoi frustrer certains, déjà échaudés par certaines alertes d’évacuation envoyées par erreur sur les smartphones de milliers de personnes. Nombre de sinistrés commencent à questionner la gestion des autorités, notamment car les pompiers ont parfois dû composer avec des bouches d’incendie vides ou avec une faible pression. Très critiquée, la maire de Los Angeles, Karen Bass, a assuré samedi que ses services sont «tous sur la même longueur d’ondes». La veille, la cheffe des pompiers de la ville avait pointé le budget insuffisant alloué par la municipalité aux soldats du feu.
Alors que le gouverneur démocrate de l’Etat le plus peuplé du pays, Gavin Newsom, a demandé vendredi «un examen indépendant complet» des services de distribution d’eau de la ville, Donald Trump a lancé dimanche une nouvelle attaque sur la gestion des feux par les dirigeants locaux. «Les politiciens incompétents n’ont aucune idée de la manière de les éteindre», a fustigé le prochain président sur sa plateforme Truth Social.
Le feu a jusqu’ici détruit ou endommagés plus de «12 000» structures. Un chiffre qui inclut des bâtiments, mais aussi des voitures, ont précisé samedi les autorités. La facture devrait se chiffrer en dizaines de milliards de dollars, et certains experts redoutent déjà que ces incendies soient les plus coûteux jamais enregistrés. Le gouverneur de l’Etat a affirmé dimanche sur NBC vouloir lancer un «Plan Marshall» pour reconstruire la Californie : «Nous luttons encore contre ces incendies, mais nous discutons déjà avec des dirigeants (...), des chefs d’entreprise, des ONG», a-t-il détaillé.
Décryptage
L’enquête pour déterminer les causes de ces multiples incendies, à laquelle participe le FBI, est toujours en cours, a rappelé samedi le shérif du comté de Los Angeles, Robert Luna. «Nous ne négligerons aucune piste», a-t-il assuré. «S’il s’agit d’un acte criminel - je ne dis pas que c’est le cas -, […] nous devons mettre la main sur le ou les responsables.»
Les vents chauds et secs de Santa Ana qui ont attisé ces incendies sont un classique des automnes et des hivers californiens. Mais ils ont atteint cette fois une intensité inédite depuis 2011, selon les météorologues, avec des rafales jusqu’à 160 km/h cette semaine. De quoi propager les braises très rapidement, parfois sur des kilomètres.
Un scénario cauchemardesque pour les pompiers, car la Californie sort de deux années très pluvieuses qui ont fait naître une végétation luxuriante, désormais asséchée par un manque de pluie criant depuis huit mois. Les scientifiques rappellent régulièrement que le changement climatique augmente la fréquence des événements météorologiques extrêmes.
Mis à jour : à 16h45 avec les dernières évolutions, et les déclarations de Gavin Newsom et Donald Trump.