Un public pour le moins tatillon. Au Mexique, un concert du chanteur Luis R. Conriquez, connu pour ses ballades encensant les narcotrafiquants, a viré à l’émeute vendredi 11 avril au soir. La raison, donnée par son représentant et les médias samedi 12 avril au soir, est simple : l’artiste a annoncé que conformément à la loi, il n’interpréterait plus ces chansons, qui font l’apologie des dirigeants du cartel de Sinaloa.
Des images vidéo diffusées par la presse et par des spectateurs montrent le chanteur expliquer sous les huées au public de la ville de Texcoco, dans l’Etat de Mexico (centre), qu’il n’interpréterait pas ces «narcocorridos» («narcoballades»). «C’est une loi qu’il faut respecter», dit-il, avant de plaider : «Moi aussi je me sens mal de ne pas vous chanter ce que vous voulez écouter.»
Le public furieux commence alors à lancer des objets en direction de la scène, à la suite de quoi le chanteur et ses musiciens quittent la salle sous les quolibets et les projections en tout genre. Une vingtaine de spectateurs se précipitent alors sur la scène et démolissent instruments de musique, écrans et équipements de son, avant de former une mêlée avec les vigiles venus les en empêcher.
Procès
Dans une story Instagram, Conriquez a rappelé samedi avoir obtempéré à un ordre des autorités de ne pas chanter de «narcocorridos». S’il y explique que pour lui, «le plus important est de satisfaire son public, à qui [il doit] tout», le chanteur a condamné «des faits lamentables» menaçant «la sécurité et la vie du public, comme l’intégrité de [son] équipe ainsi que la [sienne]». Il a également annoncé qu’il allait apporter «des changements significatifs aux textes [qu’il] interprète».
Des images d’«El Mencho», chef présumé du cartel, projetées lors d’un concert
Le gouvernement de l’Etat de Mexico a confirmé l’incident, précisant qu’il n’y avait pas eu de blessés, et a répété son appel aux municipalités pour qu’elles empêchent toute «apologie de la violence, ou référence à des personnages liés à des actes criminels ou à la consommation de stupéfiants» lors de spectacles.
La popularité croissante des «narcocorridos», ainsi que de ses variantes appelées «tumbados» ou «bélicos», est un phénomène qui inquiète les autorités mexicaines, y compris la Présidente, Claudia Sheinbaum, qui a lancé en riposte un concours binational de musique «pour la paix et contre les addictions» destiné aux jeunes du Mexique et des Etats-Unis.
Fin mars, le groupe local mexicain Los Alegres del Barranco avait fait scandale en projetant, lors d’un concert à Guadalajara (ouest), des images à la gloire d’«El Mencho», le chef présumé du cartel Jalisco Nueva Generacion (CJNG). Le département d’Etat américain avait par la suite annulé les visas de travail et de tourisme accordés aux membres de ce groupe par les Etats-Unis. Outre celui de Mexico, d’autres Etats, dont ceux de Nayarit (ouest), Basse-Californie (nord-ouest), Chihuahua (nord) et Quintana Roo (sud-est), de même que plusieurs municipalités à travers le pays, ont interdit ce type de chanson.