Un acte encore inexpliqué, dans une zone gangrenée par la violence du narcotrafic. Alejandro Arcos Catalán, 43 ans, qui avait pris ses fonctions à la mairie de Chilpancingo il y a tout juste six jours, a été sauvagement assassiné avant d’être décapité, d’après la photo de la scène macabre publiée à plusieurs reprises sur les réseaux sociaux. Sa tête a été retrouvée abandonnée sur le toit d’un camion.
Cet «homicide» a été annoncé dimanche 6 octobre par la gouverneur de l’Etat, Evelyn Salgado sur X (ex-Twitter). «Sa perte endeuille toute la société du Guerrero et nous remplit d’indignation», a ajouté la gouverneure du Mouvement pour la régénération nationale (Morena, gauche) au pouvoir. Le parquet général de l’Etat a annoncé dans un communiqué l’ouverture d’une enquête et a répété son engagement pour «l’accès à la justice et contre l’impunité», dans un pays où la plupart des crimes restent impunis.
«Ils ont assassiné notre maire de Chilpancingo, Alejandro Arcos, et il y a trois jours à peine, le secrétaire de cette même mairie, Francisco Tapia. Cela faisait moins d’une semaine qu’ils étaient en poste», a déploré pour sa part le président du PRI (opposition), Alejandro Moreno. Les élus ne mentionnent pas la décapitation, ce que font plusieurs sites d’information comme la Jornada, proche du pouvoir, ou Reforma, très critique envers le gouvernement en place. Alejandro Arcos Catalán avait remporté la mairie de Chilpancingo (283 354 habitants en 2020 d’après les chiffres officiels) lors de l’élection du 2 juin dernier sous l’étiquette du Parti révolutionnaire institutionnel (droite). Il s’était installé à la tête de la mairie le 30 septembre.
34 personnalités assassinées
D’après l’ONG mexicaine Data Civica, spécialisée dans la défense des droits humains, 34 personnalités politiques ont été assassinées dans le pays au cours de cette campagne des municipales. Les cartels, les bandes ou les gangs cherchent à «imposer des candidats» et font savoir aux autres qu’ils «n’ont pas le droit» de se présenter, détaillait en mai auprès de l’AFP Victor Serrato, procureur pour les délits électoraux, dans le Michoacan, Etat voisin du Guerrero.
Pourtant, dans les médias locaux ayant couvert sa campagne pour la mairie en juin, ou encore dans ses publications sur les réseaux sociaux, rien ne laisse apparaître une explication à son assassinat. Le 2 octobre, à l’occasion de la journée internationale de la non violence, Alejandro Arcos Catalán avait lancé un appel du «cœur» sur son compte Instagram pour espérer «atteindre un Chilpancingo en paix» : «La paix est le chemin que nous devons tous parcourir pour bâtir une société plus juste et plus sûre. Depuis Chilpancingo, je réaffirme mon engagement à promouvoir le respect, la tolérance et le dialogue comme outils pour résoudre nos différends. La violence ne peut pas être la solution.»
Investiture
La dernière publication du maire de Chilpancingo remonte à dimanche, avant 18 heures. Elle concerne une tournée effectuée dans la communauté de Tepechicotlán, pour aider les personnes touchées par l’ouragan John. «Nous continuerons à nous coordonner avec les familles pour remédier aux dommages et préparer une campagne de nettoyage massive pour prévenir les risques sanitaires», disait l’élu. Après cette visite à Tepechicotlán, le contact a été perdu avec le maire et son équipe de proches collaborateurs.
1 890 meurtres enregistrés au Guerrero en 2023
Le Guerrero, l’un des Etats les plus pauvres du Mexique, connaît depuis des années des violences liées aux guerres territoriales entre cartels luttant pour le contrôle de la production et du trafic de drogue. L’année dernière, 1 890 meurtres ont été enregistrés dans cet Etat, qui abrite la station balnéaire d’Acapulco, un ancien terrain de jeu des riches et célèbres, aujourd’hui en proie à la criminalité. Depuis plusieurs années, Chilpancingo est le théâtre d’une lutte sanguinaire entre les bandes criminelles de Los Ardillos et Los Tlacos pour le contrôle du centre de la ville.
L’assassinat d’Alejandro Arcos Catalán intervient cinq jours seulement après l’investiture de la présidente Claudia Sheinbaum, qui doit présenter mardi son plan national de sécurité. Depuis que le gouvernement a déployé l’armée pour lutter contre le trafic de drogue en 2006, plus de 450 000 personnes ont été tuées et des dizaines de milliers ont disparu dans ce pays bouleversé par une spirale de violence. Les hommes politiques, notamment au niveau local, sont fréquemment victimes d’effusions de sang liées au trafic de drogue, qui pèse plusieurs milliards de dollars au Mexique.
Mise à jour à 14 h 25 avec davantage de contexte.