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Libération
Onde de choc

Mouvement propalestinien dans les campus : la présidente de l’université Columbia démissionne

La prestigieuse faculté new-yorkaise était l’épicentre des mouvements universitaires propalestiniens qui ont secoué les Etats-Unis en avril dernier. Sa présidente, Minouche Shafik, a annoncé son retrait mercredi 14 août.
Minouche Shafik, la présidente de l'université Columbia (ici, le 17 avril 2024) a démissionné le mercredi 14 août 2024. (Tom Williams/CQ-Roll Call, Inc. Getty Imag)
publié le 15 août 2024 à 14h50

C’est un renoncement inattendu. La présidente de l’université Columbia, Minouche Shafik, a annoncé mercredi sa démission, invoquant la «période de crise» du printemps quand le campus new-yorkais fut l’épicentre des manifestations étudiantes contre la guerre à Gaza et de polémiques sur une montée de l’antisémitisme.

Le départ avec effet immédiat de cette économiste américaine d’origine égyptienne, qu’elle a annoncé dans une lettre à la communauté enseignante et étudiante, est une surprise dans la mesure où elle avait échappé à la vague de démissions l’hiver dernier de ses homologues de l’université de Pennsylvanie, Elizabeth Magill, et de Harvard, Claudine Gay.

Menaces et insultes

«Je fais cette annonce maintenant pour que la nouvelle direction soit en place avant le début du prochain semestre», a écrit «avec tristesse» Minouche Shafik. «Cela a été une période de crise au cours de laquelle il a été difficile de dépasser les opinions divergentes au sein de notre communauté», déplore-t-elle. Elle a fait état de «menaces», d’«insultes» voire de «mauvais traitements» contre elle, «des collègues» et «des étudiants» et a «décidé» que sa «démission permettra à Columbia de mieux faire face aux défis à venir». «Nous devons toutes et tous faire tout ce qui est en notre pouvoir pour résister aux forces de la polarisation», implore encore la désormais ex-présidente de Columbia.

L’université qu’elle dirigeait depuis juillet 2023 a été l’une des premières à se mobiliser au début de la guerre que conduit Israël contre le Hamas dans la bande de Gaza, en riposte à l’attaque sanglante du mouvement palestinien sur son sol le 7 octobre. Columbia a été le fer de lance en avril de manifestations et occupations de campus à travers les Etats-Unis, rappelant le mouvement contre la guerre du Vietnam en 1968. A l’appel de Minouche Shafik, la police de New York avait délogé manu militari quelques dizaines de militants et étudiants le 30 avril et la grande cérémonie de remise des diplômes avait été annulée.

Début juillet, trois administrateurs de Columbia avaient été révoqués pour des SMS échangés lors d’un forum public en mai, dont des médias conservateurs s’étaient fait l’écho et qui auraient révélé de «vieux préjugés antisémites» selon la présidence de l’Université.

La présidence, qui a annoncé vendredi 9 août restreindre l’accès du public à l’immense campus arboré du nord de Manhattan, a été accusée de ne pas avoir lutté assez fermement contre des propos ou actes visant des étudiants juifs, mais aussi d’avoir eu la main trop lourde contre de petits groupes pro-palestiniens. Cette université privée au budget colossal financé par des donateurs et grandes entreprises, dont certains liés à Israël, accueille des dizaines de milliers d’étudiants et professeurs.

Minouche Shafik avait été auditionnée par le Congrès l’hiver dernier avec d’autres présidentes d’universités, la droite républicaine les accusant de pas avoir été assez fermes et univoques face à une montée de l’antisémitisme sur les campus. Le chef de la majorité républicaine de la Chambre des représentants, Mike Johnson, venu à Columbia au pire de la crise pour dénoncer le «terrorisme» des manifestations, s’est félicité dans un communiqué mercredi soir du départ de Minouche Shafik.