Il a gardé sa moustache coupée au carré, comme dans sa vie d’avant. A tout juste 68 ans, il est sec, presque musclé sous son tee-shirt blanc et son fin jogging noir. «Petit déjeuner à 7 heures, déjeuner à 14 heures, je ne dîne plus, sourit José Rubén Zamora. Je fais 600 abdos par jour, 120 flexions.» Et 10 km de marche matinale dans son rectangle d’herbe de 12 mètres de long à l’orée de sa cellule, tournant comme un lion en cage. Sauf qu’en captivité, les lions sont mieux traités que l’ancien directeur d’El Periódico au centre pénitentiaire Mariscal-Zavala, en périphérie de Guatemala.
Livres empilés dans un coin
Arrêté le 29 juillet 2022, il a été condamné en juin 2023 à six ans de prison pour blanchiment d’argent dans un procès criblé d’irrégularités, où sa culpabilité n’a pas été prouvée. Une affaire «liée à son travail comme journaliste d’investigation et anticorruption», selon le groupe d’experts des procédures spéciales des Nations unies. Amnesty International dénonce une «détention arbitraire» et des «poursuites pénales infondées». Son véritable tort : avoir révélé des scandales de corruption impliquant le président Alejandro Giammattei (2016-2020). José Rubén Zamora était déjà l’un des plus grands journalistes du continent, il est devenu un symbole de résistance face à un système de justice à la solde du «pacte des corrompus», une caste de politiques et de fonctionnaires bien connue au Guatemala qui vérole la vie publique de ce pays d’Amérique cent