Jorge a les cernes qui lui tombent presque jusqu’au sourire, qu’il arbore très grand. Il émerge juste de sa sieste, sorti promener son chien au début du soir, fine moustache et capuche tirée sur sa casquette écarlate, dans un quartier de la ville de Mesa, en Arizona, aux alignements de petites maisons couleur sable, toutes presque identiques, avec leur étage souvent unique sous les toitures de terre cuite. La nuit passée a été courte. Le jeune homme, 29 ans, a à peine dormi, enchaînant un contrat occasionnel comme vigile d’un parking et son principal boulot dans un hôtel. Il n’a pas vraiment suivi la soirée électorale, si ce n’est à travers des messages reçus d’amis puis des posts sur les réseaux sociaux annonçant tantôt comme une délivrance tantôt comme un irréparable désastre l’élection de «son» candidat, Donald Trump.
C’est la première fois qu’il participe à une élection présidentielle, dit-il, avec l’air satisfait d’avoir su miser sur un cheval gagnant. Ses parents, qui ne votent pas, faute d’être comme lui citoyens américains, ne lui en ont transmis ni l’habitude ni l’intérêt, se justifie-t-il, et il est bien trop pris par «ses trucs» au quotidien pour s’intéresser à la politique. C’est de discuter avec des collègues et sa sœur aînée, dont il pense qu’elle a do