Donald Trump rampe, nu, dans un désert ; un peu plus tôt, il s’est retrouvé au lit avec un grand bonhomme rouge affublé de cornes, à qui il a imploré des cajoleries – refus du Diable, peu ragoûté par des attributs masculins pas assez fournis à son goût. Le président américain a beau nous avoir habitués à bien des frasques depuis janvier, celle-ci n’est pas de son fait. Et il s’en serait bien passé. Il s’agit tout bonnement de l’extrait du premier épisode, disponible depuis le 23 juillet, de la nouvelle saison de South Park, la série américaine satirique aux millions de visionnages à travers le monde.
Autant dire que la Maison Blanche n’a pas apprécié. «Cette série n’est plus pertinente depuis plus de vingt ans et se maintient à grand-peine avec des idées sans inspiration dans une tentative désespérée d’attirer l’attention», a vertement critiqué Taylor Rogers, une porte-parole. Rapide remise en contexte : le début de cette 27e saison raconte notamment une Amérique chahutée par un président totalitaire (Donald Trump, donc) qui piétine les valeurs du pays.
Le premier épisode, intitulé Sermon on the Mount, le dépeint comme un dictateur colérique, qui enchaîne les menaces d’attaques contre ses opposants – y compris Jésus, commande des tableaux à son effigie. Vient donc cette scène montrant une relation amoureuse avec le roi de l’Enfer : Trump – dont le vrai visage est utilisé – le supplie de coucher avec lui. Satan le repousse, notamment parce que son pénis est trop petit.
Good morning and Happy Thursday to everyone who LOVES the way the South Park guys absolutely cooked trump in their test season premiere, he is going to HATE the accurate size depiction of his tiny member.
— BrooklynDad_Defiant!☮️ (@mmpadellan) July 24, 2025
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L’épisode se termine après que la ville de South Park a conclu un accord financier avec le président, incluant un engagement à réaliser des messages d’intérêt public. S’ensuit un court-métrage généré par intelligence artificielle – censé être l’un de ces messages : on y voit un Trump en surpoids, titubant dans un désert. Une sorte de «Jésus moderne», indique le narrateur de la scène. «Trump. Son pénis est minuscule, mais son amour pour nous est immense.»
«Le président Trump a tenu plus de promesses en seulement six mois que n’importe quel autre président dans l’histoire de notre pays, et aucune série de quatrième ordre ne peut compromettre [cette] série de succès», a encore assuré la porte-parole de la Maison Blanche. On devine aussi que les multiples références aux parties génitales du sexagénaire – encore très associées dans l’imaginaire à un symbole de virilité – ne lui ont pas vraiment plu.
Il faut dire que même en interne, la représentation d’un faux pénis présidentiel a divisé, à en croire les créateurs de la série Matt Stone et Trey Parker. «Ils disaient : “OK, mais on va flouter le pénis.” Et moi je disais : “Non, vous n’allez pas flouter le pénis”», a raconté ce dernier jeudi 24 juillet devant le public du Comic-Con de San Diego, plus gros festival au monde consacré à la pop culture. Après «toute une conversation entre beaucoup d’adultes pendant environ quatre… jours», l’équipe a finalement décidé d’ajouter des yeux au pénis pour éviter qu’il soit flouté, a expliqué le réalisateur américain.
Lancée en 1997, South Park s’est imposée dans le paysage de la pop culture, reconnue pour son humour trash. Mais son duo de créateurs a récemment avoué son embarras… l’actualité est si délirante qu’elle complique la satire. Ils ne voient plus comment «parodier Trump» - d’où, sans doute, ce premier épisode qui frôle toujours plus les limites.
Nœuds juridiques
La diffusion de la série s’était aussi retrouvée dans un sac de nœuds juridiques : un accord de 1,5 milliard de dollars a été conclu avec Paramount, pour que le studio américain puisse la diffuser en intégralité sur sa plateforme de streaming pendant cinq ans, dans le monde entier. Le deal comprend aussi la production de 50 nouveaux épisodes. Sauf que cette acquisition des droits est intervenue à un moment délicat pour Paramount : sa fusion avec Skydance Média était suspendue à la validation du régulateur américain des télécommunications, la FCC. Les plus de 300 épisodes de South Park avaient même momentanément disparu des plateformes à travers le monde, sauf aux Etats-Unis.
Good night and good luck
La fusion entre Paramount et Skydance Media a finalement été approuvée jeudi, moyennant des changements de ligne éditoriale au sein de la chaîne CBS, une condition très atypique. L’accord intervient au terme d’une séquence qui aura vu Paramount solder, début juillet, un contentieux judiciaire avec Donald Trump concernant une interview de Kamala Harris par CBS. Il a aussi annoncé la fin de l’émission The Late Show with Stephen Colbert, dont l’animateur est très critique de Donald Trump. Au sein de la gauche américaine, de nombreuses voix ont dénoncé ces décisions comme des gages de soumission au président, pour permettre la fusion avec Skydance.