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Libération
Very bad space trip

Sous-marin disparu : maintenant, le cofondateur d’OceanGate veut envoyer 1 000 personnes sur Vénus

Sous-marin disparu près du Titanicdossier
Guillermo Söhnlein a cofondé la société à l’origine du submersible ayant implosé en juin à proximité du Titanic, lors d’une excursion vers le Titanic. Un mois plus tard, l’homme d’affaires fait la promotion d’une autre entreprise, au projet encore plus dangereux.
Sur Vénus, le mercure titille les 475 °C, température de fusion du plomb. (Baac3nes/Getty Images)
publié le 3 août 2023 à 8h07

Dans le milieu des affaires, pas de temps pour le deuil. Un mois après l’implosion funeste du sous-marin Titan et la mort de ses cinq passagers, on aurait pu s’attendre à ce que Guillermo Söhnlein fasse profil bas. Après tout, l’entrepreneur de 57 ans a cofondé OceanGate, la société à l’origine du submersible censé visiter l’épave du Titanic. Mais que nenni. Businessman toujours d’attaque, le patron a dû trouver qu’il s’agissait là d’un parfait timing pour faire la promotion d’une autre de ses sociétés, Human2Venus.

Plonger à 3 800 mètres de profondeur à bord d’un engin à la coque carbone aussi fragile que du papier à cigarette vous semblait déjà être une mauvaise idée ? Guillermo Söhnlein a trouvé mieux. D’ici 2050, dit-il vendredi 28 juillet au Business Insider, il compte bien envoyer 1 000 personnes vivre sur Vénus. Oui, Vénus. Cette planète à l’atmosphère toxique remplie de dioxyde de carbone. Encerclée d’un épais nuage jaunâtre d’acide sulfurique. Et sur laquelle le mercure titille les 475 °C, température de fusion du plomb. Autrement dit, cette planète où il fait bon vivre.

Que les sceptiques se confondent : Guillermo Söhnlein n’est pas non plus totalement inconscient. Bien évidemment, les colons ne résideront pas à la surface de la planète, voyons ! Mais une cinquantaine de kilomètres au-dessus, dans une station flottante. «L’atmosphère vénusienne est peut-être le seul endroit non terrestre du système solaire où les humains peuvent exister à long terme», souligne le site de Human2Venus. A cette hauteur, argumente la société lancée en 2020, température, pression, radiations et gravité sont similaires à celles de la Terre. Quant à l’oxygène elle serait générée dans la station, comme dans l’ISS. «Aussi surprenant que cela puisse paraitre, la haute atmosphère de Venus est le lieu le plus semblable à la Terre dans le système solaire», soulignaient des astrophysiciens dans un article publié sur le site The Conversation en octobre 2018.

«Oubliez OceanGate, oubliez Titan»

Réalisable ou non, Guillermo Söhnlein peut-il seulement incarner ce genre de projet ? Pour rappel, OceanGate, entreprise qu’il a cocréé en 2009 avant de la quitter en 2013, est aujourd’hui accusée d’avoir ignoré les alertes émises sur les failles de sécurité de son sous-marin. Un ex-dirigeant affirmait ainsi en 2018 avoir été licencié après avoir partagé ses doutes sur la sûreté de l’engin. Plusieurs enquêtes ont été ouvertes par le Canada et les Etats-Unis pour déterminer les causes de l’implosion.

«Oubliez OceanGate. Oubliez Titan. Oubliez Stockton [Stockton Rush, le PDG d’OceanGate également mort dans l’accident, ndlr]», élude Guillermo Söhlein auprès de Business Insider. Le propos, terriblement indécent et maladroit, est simple : la tragédie du Titan ne doit pas entraver le progrès, un progrès auquel son ancien compère Rush Stockton aspirait également. «L’humanité pourrait être à la veille d’une grande avancée et ne pas en profiter parce que nous, en tant qu’espèce, serons arrêtés par le statu quo», argumente-t-il.

Une avancée pour l’humanité qu’il ne faut pas repousser. Et une bataille de gros sous qu’il s’agit de ne surtout pas perdre. Sur son site, Human2Venus s’auto-interroge : pourquoi choisir Vénus, «jumelle diabolique de la Terre», plutôt qu’une autre planète ? «Peut-être qu’une meilleure question serait “Pourquoi pas ?”» se répond l’entreprise.

Peut-être aussi parce que Mars était déjà prise. La planète rouge est en effet le terrain de chasse gardée de l’entrepreneur Elon Musk. En 2016, son entreprise SpaceX travaillait déjà sur des fusées pour tenter d’y envoyer des humains d’ici 2025. Alors avis aux millionnaires et milliardaires désœuvrés et en quête d’originalité, quelques planètes restent encore à prendre. Un volontaire pour Jupiter ?