Dans la guerre, il y a le langage des armes, et ce qu’on en dit. La bataille se joue aussi dans le contrôle du récit. Avec sa conférence de Paris, l’Europe a lancé une offensive à laquelle la Russie pouvait difficilement rester sans réponse. Outre sa réaction sur la phrase d’Emmanuel Macron sur l’envoi de troupes – jugé «pas dans l’intérêt» des Occidentaux –, le Kremlin a voulu en rajouter une couche sur sa supposée progression, maigre mais tout de même significative, sur le front ukrainien.
Des «combats violents» se sont déroulés ce mardi près de la ville de Tchassiv Iar, dans l’est vers Bakhmout où l’armée russe «tente activement d’avancer», selon le commandement ukrainien. Plus tôt, les Russes annonçaient avoir «libéré» le village de Sieverné, à côté de la ville d’Avdiivka, tombée le 17 février. Surtout, et c’est là tout l’art de la communication en temps de guerre, le ministère russe de la Défense dit avoir détruit l’un des 31 chars Abrams que les Etats-Unis ont mis à disposition de l’Ukraine en septembre. Le message, qui n’a pas été confirmé de manière indépendante, est avant tout symbolique : la Russie veut faire croire qu’elle ne craint pas les livraisons d’armes occidentales.
Reportage
Des vidéos partagées depuis lundi sur certaines chaînes Telegram russes montrent un char en flamme, filmé depuis les airs, sans qu’on soit capable de distinguer s’il s’agit d’un Abrams. Le porte-parole du Kremlin, Dmitri Peskov, s’en est félicité, assurant que les chars américains «brûleront comme les autres», reprenant les mots, quelques mois plus tôt, de Vladimir Poutine au sujet des chars Leopard allemands.
Quoi qu’il en soit, cette avancée revendiquée confirme ce que l’Ukraine n’ose plus nier : Kyiv est en difficulté. Lundi, les forces armées ukrainiennes ont quitté le village de Lastotchkyné, non loin de là, «afin d’organiser la défense». Les autorités mettent en garde sur ce qu’elles jugent être une campagne de «désinformation» russe pour «réduire le soutien» occidental à l’Ukraine. La conférence de Paris aura eu le mérite de réitérer l’engagement des Européens, malgré les mauvaises nouvelles du front. Mais les paroles doivent être encore suivies des actes, et notamment de la livraison urgente de munitions, pour inverser le cours de la guerre.