Le message est clair : les Etats-Unis ne sont plus dignes de confiance. Craignant d’être espionnée, l’Union européenne aurait exhorté ses membres en partance pour Washington à adopter de nouvelles mesures de protection, selon un article du quotidien britannique Financial Times publié ce lundi 14 avril. Parmi les précautions révélées au journal par quatre sources : l’utilisation de burner phones, des téléphones portables intraçables et jetables, et d’ordinateurs portables basiques distribués par la Commission européenne. Les téléphones personnels eux, devront être éteints et placés dans des pochettes anti-espionnages, empêchant le traçage ou le piratage de l’appareil.
Pour aller plus loin
Les premiers concernés sont les commissaires et hauts fonctionnaires se rendant aux réunions de printemps du Fonds monétaire international et de la Banque mondiale, qui auront lieu à partir du 21 avril à Washington. Ils auraient également été invités à voyager avec leur laissez-passer européen plutôt que leur passeport national personnel. Délivré par l’Union européenne à ses représentants et membres du personnel lors de leurs déplacements, ce document de voyage électronique et sécurisé accorde une reconnaissance diplomatique supplémentaire, limitant le risque de fouille arbitraire effectuée aux frontières.
Dispositif similaire en Chine et en Ukraine
Bien que la Commission ait confirmé auprès du quotidien britannique une mise à jour des consignes de sécurité, elle a refusé d’en commenter les détails. Selon les quatre sources citées par le Financial Times, ces nouvelles directives sont identiques à celles d’ores et déjà utilisées lors des missions réalisées en Ukraine et en Chine, où du matériel informatique ne peut être introduit par crainte d’une surveillance russe ou chinoise. L’Union européenne s’inquiète «que les Etats-Unis n’accèdent aux systèmes de la Commission», a pointé un responsable.
Considérer les Etats-Unis comme un risque pour la sécurité européenne au même titre que la Russie ou la Chine est particulièrement révélateur de la dégradation des relations transatlantiques depuis le retour de Donald Trump à la Maison Blanche, en janvier. La guerre commerciale que livre le tribun au monde n’a pas épargné l’UE : 25 % de droits de douane sur l’acier et l’aluminium ; 25 % sur l’automobile et les pièces détachées ; 20 % sur tout le reste. Avant de finalement mettre en «pause» pour 90 jours ses tarifs douaniers, pour les renégocier au cas par cas dans le monde entier – excepté la Chine, toujours punie.
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Mais le front économique n’est pas la seule source de discorde entre les deux entités. La guerre que mène Donald Trump à la science a largement refroidi les liens amicaux entre les Etats-Unis et l’Union européenne. Des touristes et chercheurs européens se sont vu refuser l’entrée sur le territoire américain car ils avaient critiqué l’administration Trump sur les réseaux sociaux ou dans des documents saisis sur leurs appareils électroniques. En mars, c’est un scientifique français, travaillant dans le domaine spatial et en mission pour le CNRS, qui a été renvoyé dans son pays. Lors d’un contrôle aléatoire, son ordinateur et son téléphone ont été fouillés : des messages anti-Trump y figuraient. De quoi inquiéter suffisamment la Commission européenne pour changer sa politique de cybersécurité lors des voyages diplomatiques aux Etats-Unis.