La presse américaine le considérait comme le favori pour avoir le job. A 39 ans, J.D Vance, le cadet de la shortlist, a bien été choisi par Donald Trump, ce lundi 15 juillet, pour être son colistier pour l’élection présidentielle du 5 novembre. «J’ai décidé que la personne la plus apte à assumer la fonction de vice-président des Etats-Unis était le sénateur J.D. Vance, du grand Etat de l’Ohio», a indiqué le républicain sur son réseau, Truth Social. Sa nomination, au premier jour d’une convention républicaine chamboulée par la tentative d’assassinat de l’ex-président républicain, et dont l’annonce de ce «ticket» Trump-Vance est le premier moment fort, vient consacrer le parcours éclair et atypique de ce porte-voix de l’Amérique déclassée.
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Ancien militaire et auteur à succès, cet élu de l’Ohio de 39 ans et au profil éclectique n’a eu de cesse de défendre au Congrès américain les causes chères à l’ancien président républicain, comme la lutte contre l’immigration et la défense du protectionnisme économique. «J’ai une bonne mémoire. Si vous combattez politiquement Trump et les candidats qu’il soutient aujourd’hui, ne venez pas me demander mon aide dans un an pour passer votre loi ou les projets qui vous tiennent à cœur», a averti en début d’année le sénateur au visage rond, mèche impeccable et barbe soignée.
Des propos raillés par ses opposants, qui n’ont pas manqué de souligner l’ironie de la situation : avant de défendre bec et ongles Donald Trump, J.D. Vance n’était pas avare de critiques à l’égard du milliardaire. Disant un jour être un «type qui ne sera jamais pro-Trump», il a également qualifié dans le passé le magnat d’«idiot» et de «nocif», s’inquiétant même qu’il soit «l’Hitler de l’Amérique». Il a depuis complètement changé de disque, vantant en Trump un homme profond et complexe, admettant à la rigueur quelques problèmes de style mineurs.
Enfance chaotique
Après la tentative d’assassinat de l’ancien président samedi, le républicain a pointé du doigt «la campagne de Biden» qui dépeint Donald Trump comme «un fasciste autoritaire qu’il faut arrêter à tout prix». «Cette rhétorique a directement conduit à la tentative d’assassinat du président Trump», a-t-il accusé.
Avant de rejoindre Washington, J.D. Vance a eu un parcours pour le moins atypique. Il grandit dans une famille monoparentale modeste de la «Rust Belt», région du nord-est des Etats-Unis profondément marquée par le déclin industriel, puis entre dans l’armée. Il étudie ensuite le droit dans l’une des universités les plus prestigieuses du pays avant de faire carrière dans la Silicon Valley.
Mais c’est un livre, «Hillbilly Elégie», publié en 2016 qui le fait connaître. Dans ce récit autobiographique devenu un best-seller adapté au cinéma, J.D. Vance raconte son enfance chaotique dans une Amérique blanche meurtrie par le chômage et les addictions, et fait entendre la voix d’une population ouvrière désillusionnée et déclassée, pleine de rancunes.
Ce n’est que plus tard qu’il se rapproche du courant trumpiste. Son livre attire notamment l’attention du fils aîné de l’ex-président, Donald Trump Jr, dont il devient un proche ami. Ce dernier aurait exercé un grand rôle sur sa nomination au poste de vice-président. J.D. Vance fait siens les grands thèmes de Donald Trump, ainsi que son ton combatif et son discours populiste, et obtient le soutien de dernière minute du milliardaire dans sa campagne pour le Sénat en 2022.
Deux ans plus tard, l’impétueux ex-président l’a donc choisi pour l’accompagner à la Maison Blanche en cas de victoire en novembre - et pour mener d’ici là campagne, en particulier dans les Etats de sa «Rust Belt» natale. «Durant la campagne, il se concentrera sur les personnes pour lesquelles il s’est si brillamment battu, à savoir les travailleurs et les agriculteurs américains de Pennsylvanie, du Michigan, du Wisconsin, de l’Ohio, du Minnesota et bien au-delà», a martelé lundi Donald Trump sur le réseau Truth Social.
Candidat à sa réélection, le président démocrate Joe Biden a de son côté accusé le sénateur de l’Ohio de vouloir défendre les «riches». «Voici ce qu’il en est de J.D. Vance. Il parle beaucoup des travailleurs. Mais aujourd’hui, lui et Trump veulent augmenter les impôts des familles de la classe moyenne tout en accordant de nouvelles réductions d’impôts aux riches. Eh bien, je n’ai pas l’intention de les laisser faire», a-t-il écrit sur X. Son équipe de campagne a qualifié le colistier de Donald Trump d’«extrémiste».
Here’s the deal about J.D. Vance. He talks a big game about working people. But now, he and Trump want to raise taxes on middle-class families while pushing more tax cuts for the rich.
— Joe Biden (@JoeBiden) July 15, 2024
Well, I don’t intend to let them. And if you’re with me, pitch in: https://t.co/ALkc9uHFh9
Nouvelle droite
En deux ans, le sénateur républicain, qui met en avant sa foi chrétienne comme boussole privée et politique, s’est imposé au Congrès comme un défenseur féroce du magnat républicain, ciblé par plusieurs procédures pénales et civiles. «L’administration Biden veut voir Trump mourir en prison et ruiner sa famille. C’est la plus grande attaque contre la démocratie jamais vue», a-t-il fustigé sur X en mars. Et de poursuivre : «Si vous êtes trop lâche pour le dénoncer, vous n’êtes pas prêt pour ce moment de politique américaine».
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Ce père de trois enfants est devenu une figure prisée des plateaux de télévision, sur lesquels il défend énergiquement et avec loyauté le candidat républicain à la présidentielle de novembre. S’il est parfaitement aligné sur les positions migratoires et économiques de son patron, J.D. Vance apparaît cependant davantage à droite sur d’autres questions, comme l’avortement, où il s’est prononcé contre des exceptions aux interdictions, même en cas de viol ou d’inceste.
J.D. Vance est même devenu la figure de tête du mouvement de «la Nouvelle Droite», des jeunes conservateurs qui tentent de donner une orientation plus radicale au mouvement isolationniste et anti-immigration de Donald Trump, écrivait en mars Politico. «Contrairement aux partisans républicains plus conventionnels de Trump, la cohorte de la Nouvelle Droite de Vance considère que Trump n’est que la première étape d’une révolution populiste-nationaliste plus large qui est déjà en train de remodeler la droite américaine», pouvait-on y lire. «Et, s’ils parviennent à leurs fins, cela refaçonnera bientôt l’Amérique dans son ensemble».