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Interview

Trump de nouveau candidat ? «Sa “magic touch” est sérieusement érodée»

Élections américaines de 2024dossier
Les midterms de la semaine dernière se sont terminées sur une mauvaise note pour les républicains mais cela n’arrête pas Donald Trump. Il a promis une «grande annonce» ce mardi soir en Floride. Eclairage avec la spécialiste des Etats-Unis Françoise Coste.
Si Trump se présentait, ce serait la première fois depuis le président Cleveland au XIXe qu’un président qui a n’a pas réussi à se faire réélire après quatre ans à la Maison Blanche se représente quatre ans plus tard. (Gaelen Morse/REUTERS)
publié le 15 novembre 2022 à 19h24

Quel avenir pour Donald Trump ? Alors que les élections de mi-mandat aux Etats-Unis n’ont pas vu se lever de vague rouge - la couleur des républicains -, l’ancien président des Etats-Unis a convoqué toute la presse dans son domaine de Mar a Lago, en Floride ce mardi soir. Françoise Coste, historienne et spécialiste des Etats-Unis, maître de conférences à l’université Toulouse-Jean-Jaurès détaille pour Libération les choix qui s’offrent au leader républicain en perte de dynamique.

Que doit-on attendre du discours de Donald Trump ?

On voit mal ce qu’il pourrait annoncer d’autre que sa candidature à la présidentielle 2024. D’après ce que l’on sait, il voulait absolument annoncer sa candidature avant les midterms, en début de semaine dernière. Son cercle intime l’en aurait dissuadé. Cela aurait transformé le scrutin en espèce de référendums «oui ou non à la candidature de Trump». Il semblerait qu’il ait écouté les conseils parce qu’il a fait campagne de soutien à des candidats mais il n’a pas encore annoncé la sienne. S’il se présentait, ce serait la première fois depuis le président Grover Cleveland au XIXe siècle, qu’un président qui a n’a pas réussi à se faire réélire après quatre ans à la Maison Blanche se représente quatre ans plus tard.

Annoncer sa candidature deux ans avant l’échéance, c’est une bonne idée ?

C’est judicieux pour au moins deux raisons. Tout d’abord, il faut au minimum une année entière pour se faire connaître, trouver des militants et surtout des fonds. Evidemment, Donald Trump n’a pas besoin de se faire connaître, mais il lui faut tout de même un trésor de guerre pour une éventuelle campagne électorale. Par conséquent, il doit dès maintenant aller chercher des fonds. En plus de ce calendrier de récolte d’argent, il veut à tout prix «griller» tout le monde et être le premier à candidater chez les républicains pour empêcher les autres rivaux potentiels de se déclarer. Par ailleurs, les midterms sont souvent vues comme une transition vers la présidentielle. Ce n’est pas la première fois que des candidats démocrates ou républicains se présentent à ce moment-là.

Qui pourrait faire de l’ombre à Donald Trump ?

Beaucoup en parlaient déjà avant les élections de mi-mandat mais principalement Ron DeSantis, le gouverneur républicain de Floride. Il est non seulement très populaire mais aussi très trumpiste dans sa politique tout en étant anti-Trump dans son comportement puisqu’il est moins sujet au scandale. Ce qui fait de lui quelqu’un de très apprécié du public mais surtout des républicains. Il y a quatre ans il s’est présenté avec un programme conforme aux valeurs de l’ancien Président en se positionnant notamment contre le port du masque pendant la pandémie de Covid, sur l’immigration et l’avortement. De plus, il a été réélu triomphalement la semaine dernière dans un Etat clé pour le collège électoral. Au-delà d’être apprécié par les autres républicains, beaucoup de financiers du parti se demandent si cela ne serait pas mieux de tourner la page Trump.

Pourquoi les républicains font-ils moins confiance à Donald Trump après les résultats des midterms ?

En plus de la Chambre des représentants, les républicains voulaient absolument le pouvoir au Sénat et donc tous les pouvoirs qui vont avec : la présidence des commissions, décider sur la politique étrangère et surtout la possibilité d’élire les juges à la Cour suprême. C’était des enjeux très important. Maintenant qu’ils ont perdu, ils cherchent un bouc émissaire. Même si l’influence de l’ancien président a baissé, dire que c’est de sa faute est plus facile que de se remettre en question sur leur propre idéologie et d’admettre leur décalage avec la réalité et la société actuelle. Plus on regarde les résultats et plus on se rend compte que des questions comme l’avortement par exemple mobilisent les jeunes et les femmes contre les républicains.

Est-ce que les doutes des républicains posent problème quant à l’avenir de Trump en politique après les midterms ?

Trump sort affaibli des midterms. Il n’y a pas eu la vague rouge annoncée, et précisément parce que tous les candidats qu’il avait sélectionnés presque personnellement et qui étaient des «deniers», qui comme lui continuent à avancer l’idée que la victoire de Joe Biden en 2020 a été truquée, ont perdu. Il est parti faire campagne dans leurs Etats comme le Michigan, l’Arizona ou bien le Nevada en vain. C’est l’image du faiseur de rois qui en prend un coup. C’est comme si sa «magic touch» était sérieusement érodée.