C’est la fin de longues négociations. Les autorités américaines ont donné jeudi 24 juillet leur feu vert à la société de production Skydance pour l’acquisition du groupe de médias Paramount Global. Il aura fallu un an aux autorités américaines pour trancher sur le projet de Skydance, qui a mis 8,4 milliards de dollars sur la table pour prendre le contrôle du groupe.

Pour concrétiser cette fusion, l’accord de l’administration Trump était indispensable car le processus est en effet supervisé par la Federal Communications Commission, régulateur américain des télécommunications (FCC). Skydance a obtenu leur aval, mais cela s’est fait moyennant des changements de ligne éditoriale au sein de CBS, chaîne appartenant au groupe, soit une condition très atypique. Cela survient au terme d’une séquence qui aura vu Paramount solder, début juillet, un contentieux judiciaire avec Donald Trump, puis annoncer la fin de l’émission The Late Show, dont l’animateur, Stephen Colbert, est très critique à l’égard du président américain.

Dans un communiqué, la FCC se targue d’avoir obtenu de Skydance la promesse d’adopter, au sein de la chaîne CBS, «des mesures de nature à corriger les biais qui ont sapé la confiance [du public] dans les médias nationaux». La chaîne a en effet souvent été dans le viseur des autorités, Donald Trump l’accusant régulièrement d’être «hors de contrôle». Mi-avril, il s’en est pris à l’émission 60 Minutes, coupable, selon lui de diffamation à son endroit, et s’est dit favorable à ce que le directeur de la FCC sanctionne la chaîne pour son «comportement illégal».

En octobre, il avait attaqué CBS en justice, reprochant à l’émission 60 Minutes d’avoir modifié de façon trompeuse une interview de sa rivale démocrate Kamala Harris quelques semaines plus tôt. Début juillet, Paramount a accepté de verser 16 millions de dollars pour mettre un terme à cette procédure, dans laquelle le milliardaire républicain demandait 20 milliards de dollars de dommages et intérêts.

Plusieurs voix se sont alors élevées pour dénoncer la décision de Paramount, accusé d’acheter les faveurs du président américain pour obtenir le feu vert de la FCC. Stephen Colbert, présentateur du Late Show, émission phare de troisième partie de soirée, a qualifié ce versement de «bon gros pot-de-vin». Et d’ajouter : «Je ne sais pas s’il sera possible de me redonner confiance dans cette entreprise», a lancé l’humoriste sexagénaire. Quelques jours plus tard, la chaîne CBS a prévenu de l’arrêt du célèbre talk-show à la fin de la saison, évoquant une «décision purement financière».

«Au-delà de la corruption, cet accord est aussi» une manœuvre du gouvernement Trump «pour amener la couverture journalistique de CBS à favoriser la droite MAGA», a commenté, sur X, le sénateur démocrate Ed Markey, en référence au slogan de Donald Trump («Rendre à l’Amérique sa grandeur»). «C’est exactement à cela que ressemble la censure aux Etats-Unis», a martelé l’élu du Massachusetts.

La FCC a également reçu de Skydance l’assurance de la suppression des programmes de promotion de la diversité et de l’inclusion au sein du groupe Paramount. Donald Trump entend faire disparaître ces initiatives de toutes les entreprises, entités publiques et établissements d’enseignement, les considérant comme un instrument de discrimination antiblanc.

Cette fusion doit aider à relancer Paramount, dont le chiffre d’affaires se contracte et qui peine à être rentable. De son côté, Skydance essaie, comme ses concurrents, de se développer dans le streaming, et compte sur la plateforme Paramount +, filiale du groupe de média qu’il vient d’acquérir. En effet, Skydance, qui est à l’origine de plusieurs volets de la saga Mission : Impossible ainsi que de Top Gun : Maverick, ne dispose pas de ses propres canaux de diffusion. Mais Paramount + est un petit Poucet du secteur et reste déficitaire, plus de quatre ans après son lancement.