Elle a pleuré de soulagement à l’annonce de la décision. Une juge de l’Etat américain du Texas, où les IVG sont interdites sauf très rares exceptions, a décidé ce jeudi 7 décembre d’autoriser Kate Cox, 31 ans, à avorter, elle dont la grossesse pourrait selon son médecin menacer la vie et la fertilité. La jeune femme a eu la confirmation la semaine dernière que son fœtus était atteint de trisomie 18 et réclame de pouvoir avorter.
Lors d’une audience d’urgence de moins d’une heure, la juge d’un tribunal d’Austin, Maya Guerra Gamble, a accédé à sa requête, estimant que l’idée que la requérante puisse perdre la possibilité de devenir de nouveau mère était «choquante». «Ce serait une véritable erreur judiciaire», a-t-elle insisté. L’Etat du Texas peut toutefois faire appel.
L’avocate du Center for Reproductive Rights (Centre pour les droits reproductifs), qui a déposé plainte au nom de Kate Cox et de sa gynécologue-obstétricienne, a expliqué que la jeune femme avait dû se rendre une nouvelle fois aux urgences cette semaine en raison de fortes douleurs. «La vie et la fertilité future de Kate Cox sont en danger», a dit Molly Duane. Elle doit obtenir «l’avortement dont elle a besoin maintenant pour mettre fin à sa souffrance et protéger sa fertilité».
Médecins terrifiés à l’idée d’être poursuivis en justice
A l’été 2022, la Cour suprême des Etats-Unis a cassé l’arrêt Roe v. Wade, qui garantissait depuis un demi-siècle le droit fédéral des Américaines à interrompre leur grossesse. Le Texas a interdit depuis toutes les IVG, y compris en cas d’inceste ou de viol. Seule exception : en cas de danger de mort ou de risque de grave handicap pour la mère. Mais les défenseurs du droit à l’avortement affirment que les exceptions sont trop floues et que les médecins sont terrifiés à l’idée d’être poursuivis en justice.
Le fait que le fœtus de Kate Cox, qui est enceinte de 20 semaines, soit atteint de trisomie 18 signifie qu’il risque de mourir in utero. Même si la grossesse va à son terme, la probabilité que le bébé soit mort-né ou meure quelques jours plus tard est élevée. Des échographies ont révélé qu’il présentait notamment des anomalies à la colonne vertébrale et à l’abdomen et que le développement de son crâne et de son cœur était anormal.
Mais en raison de la loi au Texas, Kate Cox ne peut avorter, ses médecins lui disant avoir «les mains liées» et qu’elle doit attendre que le bébé meure dans son ventre, selon sa plainte. En raison de césariennes antérieures, le déclenchement du travail comporte en outre un risque élevé de rupture de l’utérus, ce qui pourrait la tuer ou l’empêcher de tomber enceinte à l’avenir si une hystérectomie est nécessaire, d’après la même source.
L’avocate dénonce qu’il faille attendre qu’une patiente soit «sur le point de mourir»
Au nom du Texas, Johnathan Stone, du bureau du procureur général, a affirmé que «la seule partie prenante qui va subir un préjudice immédiat et irréparable dans cette affaire» si la cour accède à la requête d’urgence de Kate Cox «est l’Etat». «L’avortement, une fois pratiqué, est permanent, il ne peut être défait», a-t-il argué. Certes.
«Nous croyons fermement que la situation (de Kate Cox) relève de l’exception médicale prévue par les lois texanes sur l’avortement», a martelé de son côté Molly Duane. Or, «l’Etat tente de remettre en question les médecins de Kate Cox et de dire qu’elle n’est toujours pas assez malade […]. Désormais, une patiente doit être sur le point de mourir avant qu’un médecin ne puisse invoquer l’exception», a-t-elle dénoncé.