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Répression

Venezuela : l’opposante María Corina Machado brièvement arrêtée après une manifestation anti-Maduro

Elle participait ce jeudi 9 janvier à une manifestation à Caracas à la veille de l’investiture contestée du président Nicolás Maduro. Les autorités nient l’avoir interpellé.
Maria Corina Machado, à Caracas, ce jeudi. (Pedro Mattey /AFP)
publié le 9 janvier 2025 à 21h45
(mis à jour le 9 janvier 2025 à 22h10)

Elle n’était pas apparue en public depuis fin août. Selon ses proches, la cheffe de file de l’opposition vénézuélienne, María Corina Machado, 57 ans, a été brièvement arrêtée ce jeudi 9 janvier alors qu’elle quittait une manifestation à Caracas contre l’investiture du président Nicolás Maduro. Quelques minutes auparavant, son équipe avait annoncé sur X (ex-Twitter) qu’elle avait été «violemment interceptée à sa sortie de la manifestation». Selon la publication, des coups de feu ont été tirés : «les troupes du régime ont tiré sur les motos qui la transportaient». Le gouvernement espagnol a exprimé peu de temps après son «inquiétude» et sa «condamnation totale».

Mais quelques minutes plus tard, le ministère de la Communication de l’Information du gouvernement de Nicolás Maduro a publié une vidéo de l’opposante sur son compte Instagram. On la voit assise sur un trottoir, une capuche sur la tête, murmurant qu’elle a été «pourchassée» en sortant de la manifestation mais qu’elle est désormais «sauve». Dans la publication, le ministère dénonce «une manoeuvre» de l’opposition pour masquer «l’échec de leur manifestation».

L’équipe de l’opposante a finalement confirmé qu’elle avait «été libérée», tout en assurant que « durant son enlèvement, elle a été forcée à enregistrer plusieurs vidéos ». Elle doit s’exprimer plus tard dans la journée pour détailler sa version des faits.

«Jour historique»

María Corina Machado, qui vit dans la clandestinité, n’était pas apparue en public depuis le 28 août. Elle est pourtant venue participer à la manifestation anti-Maduro à Caracas, vêtue de blanc et brandissant un drapeau vénézuélien, à la veille l’investiture du président socialiste, dont elle conteste l’élection. Elle est arrivée à bord d’un camion, sous les vivats, dans le quartier commercial et huppé de Chacao.

«Tout le Venezuela est dans la rue, Nous n’avons pas peur !» a lancé l’opposante, qui avait juré de ne vouloir «manquer pour rien au monde ce jour historique». Celle qui est accusée d’être une «criminelle» par Maduro avait envisagé une éventuelle arrestation, confiant lundi à l’AFP : «Si quelque chose m’arrive, la consigne est très claire […], personne ne négociera la liberté du Venezuela contre ma liberté.»

Les autorités ont massivement déployé les forces de l’ordre dans le pays, particulièrement dans la capitale Caracas, jurant que cette dernière se passera «dans la paix» et la «normalité». Si Nicolas Maduro doit prêter serment vendredi pour un troisième mandat à l’Assemblée nationale, l’opposition revendique la victoire de son candidat Edmundo Gonzalez Urrutia – exilé en Espagne depuis septembre. Elle assure que les procès-verbaux des bureaux de vote qu’elle a recueillis prouvent que l’ancien diplomate a remporté le scrutin haut la main – plus de 67 % des voix – face à «un régime qui se sait battu» et complètement isolé sur le plan international. Ce jeudi soir, l’opposant Gonzalez Urrutia a rapidement réclamé la libération immédiate de Maria Corina Machado.

De nombreuses arrestations ces derniers jours

Le Conseil national électoral (CNE) avait proclamé le président sortant vainqueur du scrutin avec 52 % des voix, mais sans publier les procès-verbaux, se disant victime d’un piratage informatique. Une hypothèse jugée peu crédible par de nombreux observateurs. L’annonce du CNE avait provoqué des manifestations spontanées dans tout le pays, durement réprimées. Les troubles post-électoraux se sont soldés par 28 morts, plus de 200 blessés, et 2 400 personnes arrêtées pour «terrorisme».

Les forces de sécurité ont procédé à quelque 150 arrestations ces derniers jours. Le respecté Carlos Correa, directeur d’une ONG réputée de défense des droits humains a par exemple été arrêté. L’ONU s’est dite «profondément inquiète» jeudi de la détention d’opposants politiques et notamment celle de Carlos Correa, a écrit Volker Türk, le Haut-Commissaire de l’ONU aux droits de l’homme.

Edmundo Gonzalez Urrutia avait envisagé d’aller à Caracas vendredi pour prêter serment à la place de Nicolas Maduro, un projet jugé «improbable» par des observateurs. Les autorités vénézuéliennes, qui ont mis à prix pour 100 000 dollars la tête de Gonzalez Urrutia, ont promis la prison à tous ceux qui l’accompagneraient, affirmant qu’elles réagiraient comme face à une «force d’invasion».