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C'est moi le plus beau

«Vous n’avez encore rien vu» : Trump célèbre ses cent jours avec des œillères

Malgré des sondages en berne, le président américain s’est livré à un long autosatisfecit devant ses partisans d’un début de mandat le «plus réussi» de l’histoire.
Donald Trump à Warren, dans le Michigan, mardi soir. (Jeff Kowalsky/AFP)
publié le 30 avril 2025 à 7h51

«Nous ne faisons que commencer», a promis Donald Trump mardi, en marquant sur un ton triomphaliste et agressif un début de mandat frénétique, qui a ébranlé le monde et déstabilisé l’Amérique. Savourant l’adulation de partisans rassemblés dans le Michigan (région des Grands Lacs, nord), le président, confronté à des sondages difficiles, a vanté les «100 jours les plus réussis» de l’histoire américaine. «Vous n’avez encore rien vu», a-t-il martelé.

«Faire campagne me manque», a lâché le républicain de 78 ans, dans un long discours ressemblant à s’y méprendre à ceux qu’il prononçait comme candidat. Joe Biden «l’endormi», les médias «menteurs», les juges «communistes», les pays alliés qui «nous ont pillés plus que nos adversaires en matière de commerce», les opposants démocrates traités de «gauchistes cinglés», le chef de la Banque centrale Jerome Powell qui «ne fait pas du très bon boulot», l’idéologie «woke» et les éoliennes… Toutes les bêtes noires de Donald Trump y sont passées.

L'analyse de notre correspondant à New York

Il a défendu son offensive protectionniste, promesse selon lui d’un nouvel «âge d’or» économique, ainsi que ses opérations d’expulsions d’immigrés en situation irrégulière. La foule a scandé «USA ! USA devant une vidéo montrant des hommes menottés et entravés, filmés en train de se faire raser la tête. L’une des plus proches conseillères du républicain, Margo Martin, a même lancé sur scène : «Trump 2028, ça vous parle en référence à un hypothétique troisième mandat, ce que la Constitution interdit.

«Je dirige le pays et le monde»

Du moment où il a levé la main pour prêter serment le 20 janvier, le républicain s’est imposé comme seul centre de gravité de la vie publique américaine et il a entraîné la planète dans son orbite chaotique. «Je dirige le pays et le monde», s’est-il félicité lundi dans un entretien avec The Atlantic, en assurant auprès des reporters du mensuel qu’il «passait un très bon moment».

Ce n’est pas le cas de tous les Américains, déboussolés par le bras de fer commercial qu’il a engagé avec la Chine et dans une moindre mesure avec le reste du monde. «Tout ira bien», a voulu rassurer le président américain sur ABC mardi soir, estimant que les droits de douane massifs visant la Chine étaient une «bonne» chose et que Pékin les avait «mérités».

L'édito de Dov Alfon

Rien d’étonnant à ce que Donald Trump, dont la carrière politique s’est faite en creusant les divisions, ne connaisse pas l’état de grâce accompagnant généralement les débuts d’un président. Mais les sondages d’opinion s’accordent pour constater une glissade abrupte de sa cote de confiance, nourrie principalement par les doutes sur l’économie.

Selon un sondage Ifop réalisé pour le site d’informations touristiques NYC. eu dont Libération a eu la primeur ce mardi 29 avril, près de six Américains sur dix (56 %) disent ressentir de la honte à l’égard de Donald Trump.

Plus de 140 décrets signés

«Trump n’a rien fait pour améliorer la vie des familles de la classe moyenne et ces dernières commencent à regretter leur choix», a assuré dans un communiqué le Parti démocrate, qui souffre d’un profond discrédit selon les enquêtes d’opinion.

Le président américain a totalement bouleversé le rôle international de la première puissance mondiale, qui à l’entendre aurait tout intérêt à se replier sur une sphère d’influence régionale, étendue si possible au Groenland voire au Canada.

Le républicain a signé au total plus de 140 décrets – dont beaucoup ont été bloqués en justice – pour attaquer ses adversaires politiques, lancer une politique d’expulsions massives d’immigrés en situation irrégulière et démanteler la bureaucratie fédérale avec l’aide de son allié milliardaire Elon Musk.

D’après un sondage publié dimanche par le Washington Post et ABC News, 64 % des personnes interrogées jugent qu’il va «trop loin» dans sa tentative d’étendre les pouvoirs présidentiels. Le président américain a affirmé sur ABC qu’il «détesterait» que des Américains pensent qu’il s’arroge trop de pouvoirs. «Je fais une chose : je rends sa grandeur à l’Amérique.»