Comme d’autres préparent leur mort, Tenzin Gyatso, bientôt 90 ans, prépare sa réincarnation. L’homme souriant aux lunettes rectangulaires, que ses adeptes considèrent comme un «Bouddha vivant», que ses proches désignent sous le vocable de «sa Sainteté» et que le monde entier a appris à connaître sous son titre de dalaï-lama, sait que sa disparition est le dernier grand défi qu’il a à relever. Chef spirituel et longtemps politique du Tibet, il a maintenu vivante la voix et l’âme d’une nation écrasée par l’annexion chinoise, malgré un exil forcé en Inde depuis près de soixante-dix ans. Sa disparition inéluctable est l’occasion qu’attend Pékin pour faire taire définitivement toute voix rebelle.
Selon les préceptes du bouddhisme tibétain, la recherche de la réincarnation du dalaï-lama ne doit débuter qu’après sa mort. La direction de la fumée de son brasier de crémation, celle de son regard sur son lit de mort ou les reflets à la surface de lacs d’oracle sont autant de signes censés mener les émissaires bouddhistes vers sa nouvelle enveloppe corporelle, supposée être venue a