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Après 17 ans dans le couloir de la mort, Serge Atlaoui attendu en France mercredi

Condamné à mort en 2007 pour trafic de drogue, l’homme de 61 ans a été extrait de la prison de Salemba, à Jakarta, ce mardi 4 février. Il doit regagner la France à la suite d’un accord conclu fin janvier avec les autorités indonésiennes.
Serge Atlaoui avait été arrêté en 2005 dans une usine où des dizaines de kilos de drogue avaient été découvertes, en banlieue de Jakarta, et les autorités l’avaient accusé d’être un «chimiste». (Romeo Gacad/AFP)
publié le 3 février 2025 à 17h22
(mis à jour le 4 février 2025 à 12h06)

Une issue attendue depuis plusieurs années. Serge Atlaoui, 61 ans, arrêté en novembre 2005 puis condamné à mort en Indonésie en mai 2007 pour trafic de drogue, doit s’envoler pour la France ce mardi 4 février, à l’issue d’un accord de transfèrement conclu fin janvier. «Ce retour, j’irais jusqu’à dire que c’est un miracle. Il a survécu à 19 ans d’incarcération. Il a survécu à une exécution», confie Sabine Atlaoui, son épouse, à RTL.

Depuis le 11 novembre 2005, jour de son interpellation près de Jakarta, le Messin attendait cette journée, sans avoir jamais perdu l’espoir : mardi, à la mi-journée heure locale, il a été extrait de sa cellule de la prison de Salemba, dans la capitale indonésienne. Un convoi doit le conduire vers l’aéroport Soekarno-Hatta d’où il sera pris en charge par des policiers français. Il décollera en fin de journée pour Paris où il atterrira mercredi 5 février matin avant de retrouver Sabine ainsi que leur fils, né en 2010 alors que l’homme était déjà en détention. Des retrouvailles qui ne se feront toutefois que lorsque l’homme sera libre, selon son souhait, précise sa compagne. «Pour Serge Atlaoui, il y a une immense joie de retrouver son enfant et de le serrer dans ses bras. Son petit garçon est lui aussi très impatient. C’est un soulagement pour toute la famille», confirme auprès de Libération Richard Sédillot, l’avocat de l’ex condamné à mort. «C’est ce moment là que j’attendais», affirmel’épouse de Serge Atlaoui à RTL avant d’ajouter : «j’aimerais que ça se fasse dans l’intimité, parce que je pense que je vais en pleurer. Cette fois, je me donnerai l’autorisation de pleurer.»

«Il sera ensuite conduit à Bobigny et présenté au parquet puis placé en détention», précise l’avocat avant d’ajouter : «Nous interviendrons devant le tribunal compétent qui statuera sur l’adaptation de la peine et nous demanderons qu’une adaptation permette sa mise en liberté.»

Pour des «raisons humanitaires»

Demandé officiellement le 4 novembre par la France dans une lettre du ministre de la Justice, le retour de Serge Atlaoui a été rendu possible par la signature d’un accord le 24 janvier entre Gérald Darmanin, le garde des Sceaux et Yusril Ihza Mahendra, ministre indonésien en charge des Affaires juridiques et des droits humains.

Dans cet accord, Jakarta explique avoir décidé de «ne pas exécuter» le prisonnier et d’autoriser son retour pour des «raisons humanitaires», ce dernier étant «malade». Ces derniers temps, l’homme de 61 ans a en effet suivi chaque semaine un traitement, dans un hôpital proche de sa prison. Jakarta laisse également la liberté au gouvernement français d’accorder «sa clémence, une amnistie ou une réduction de peine» au seul Français actuellement condamné à mort dans l’archipel.

Serge Atlaoui avait été arrêté en 2005 dans une usine où des dizaines de kilos de drogue avaient été découvertes, en banlieue de Jakarta, et les autorités l’avaient accusé d’être un «chimiste». Venu de Metz, dans le nord-est de la France, cet artisan soudeur, père de quatre enfants dont l’un né pendant sa détention, s’est toujours défendu d’être un trafiquant de drogue, affirmant qu’il n’avait fait qu’installer des machines industrielles dans ce qu’il croyait être une usine d’acrylique.

L’affaire avait fait grand bruit en Indonésie, où la législation antidrogue est l’une des plus sévères du monde. De nombreuses personnalités, dont la chanteuse franco-indonésienne Anggun, s’étaient mobilisées pour le soutenir. Initialement condamné à la prison à vie, il avait vu la Cour suprême alourdir la sentence et le condamner à la peine capitale en appel. Il devait être exécuté aux côtés de huit autres condamnés en 2015, mais a obtenu un sursis après que Paris a intensifié la pression, les autorités indonésiennes ayant accepté de laisser un appel en suspens suivre son cours.

530 condamnés dans les couloirs de la mort

L’Indonésie compte actuellement au moins 530 condamnés dans le couloir de la mort, selon l’association de défense des droits Kontras, citant des données officielles. Parmi eux, plus de 90 étrangers, dont au moins une femme, selon le ministère de l’Immigration et des services correctionnels.

Un autre Français, Félix Dorfin, arrêté sur l’île touristique de Lombok, avait été condamné, au-delà des réquisitions, à la peine de mort en 2019, également pour un trafic de drogue qu’il a toujours nié. La sentence a ensuite été commuée en une peine de 19 années d’emprisonnement qu’il purge actuellement.

Mise à jour : le 4 février à 12 heures, avec les propos de sa femme Sabine, sur RTL.