Pour son premier déplacement depuis sa réélection, Narendra Modi foulera les tapis du Kremlin. Le Premier ministre indien est arrivé ce lundi 8 juillet en Russie pour deux jours de discussions avec «son ami Vladimir Poutine pour échanger des points de vue sur diverses questions régionales et mondiales», a déclaré le chef du gouvernement indien dans un communiqué. Moscou, de son côté, «accorde une importance primordiale à cette visite», a précisé Iouri Ouchakov, l’un des conseillers du président russe. Les deux dirigeants, visiblement impatients de se retrouver, n’ont pas attendu le sommet des Brics prévu en octobre. Ils ont préféré organiser cette rencontre annuelle juste après la réélection de Modi, le 4 juin.
Interview
Coopération énergétique, défense commune et nouvelles routes commerciales seront officiellement au cœur des discussions bilatérales. Les relations entre Moscou et New Delhi sont anciennes. Le choix de Narendra Modi de visiter la Russie au début de son nouveau mandat, avant même les pays voisins comme le Bhoutan, les Maldives ou le Sri Lanka, constitue un écart avec les habitudes des dirigeants indiens, analyse le quotidien indien The Economic Times. Pour Moscou, cette rencontre va «aider à contrer les tentatives occidentales de marginaliser Poutine à la suite de l’invasion de l’Ukraine en février 2022», tout en renforçant les liens avec un partenaire commercial majeur et un acheteur important de son pétrole. Pour New Delhi, la position ambivalente de l’Inde sur le conflit ukrainien, combinée aux sanctions américaines contre la Russie, offre une opportunité d’acheter du pétrole à des prix réduits, souligne Ved Shinde, chercheur du groupe de réflexion australien Lowy Institute. L’Inde a constamment prôné «le dialogue et la diplomatie» face à la guerre.
Stratégie de coopération renforcée
«La [conclusion] d’accords majeurs est peu probable en raison du manque d’informations sur la visite de Modi», relativise Ivan Shchedrov, chercheur invité à un groupe de réflexion l’Observer Research Foundation, basé à Delhi. Mais les discussions devraient inclure la question du «corridor de transport international Nord-Sud», un projet d’itinéraire ferroviaire et naval reliant l’Inde à la Russie via l’Iran. Il s’inscrit dans les efforts de Moscou pour développer de nouvelles routes commerciales face aux sanctions occidentales, qui ont poussé à rediriger les flux commerciaux de l’Europe vers l’Asie et le Moyen-Orient. Enfin, la route maritime entre Vladivostok (sud-est de la Russie) et Chennai (sud-est de l’Inde) sera possiblement abordée, note Ivan Shchedrov. Récemment, la Russie a acheminé du charbon en Inde par cette voie de navigation, s’est félicité le journal indien The Financial Express.
Des tensions récentes ont toutefois émergé entre les deux pays, notamment en raison de la participation de ressortissants indiens au conflit en Ukraine, après leur enrôlement par l’armée russe – 30 à 40 soldats seraient concernés. L’Inde a demandé la démobilisation anticipée de ses citoyens «induits en erreur», selon l’agence de presse Reuters. Le secrétaire aux Affaires étrangères, Vinay Kwatra, a déclaré que le gouvernement Modi souhaitait un arrêt immédiat de ce recrutement, après que quatre Indiens ont été tués.