Nishara Subhasinghe monte les gigantesques escaliers blancs recouverts de moquette rouge et passe devant les peintures centenaires accrochées sous les plafonds à une vingtaine de mètres de hauteur. Arrivée en haut des marches, elle ralentit, se retourne. Et écarquille les yeux. «C’est donc dans ce palais que vivait notre président ?» s’étonne cette femme de simple apparence. Samedi, des dizaines de milliers de manifestants, qui réclamaient depuis trois mois la démission du président sri-lankais Gotabaya Rajapakse, ont brisé cinq niveaux de barrages policiers pour conquérir ce palais présidentiel. Ils ont fait fuir son résident honni, considéré comme responsable de la pire crise économique que connaît le Sri Lanka depuis son indépendance, en 1948.
Ils ont ensuite ouvert au public les portes de cette propriété imposante, bâtie par les colons britanniques en 1804 pour y accueillir leurs gouverneurs. Depuis, c’est un raz de marée : des dizaines de milliers de Sri-Lankais affluent chaque jour, formant des queues de plusieurs centaines de mètres dans les rues historiques du quartier du Fort à Colombo, et doivent alors attendre plus de quatre heures au soleil pour vivre quelques instants royaux. «C’est un moment historique, dit Nishara, émue. Je ne pensais pas que je verrais ce palais un jour.» Elle est venue avec ses enfants depuis la grande banlieue de la capitale, à 60 kilomètres de là,