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Canal Carpio

Aux Philippines, le tour de passe-passe du président Duterte

Dans l’impossibilité de briguer un nouveau mandat, le dirigeant autoritaire a annoncé son retrait prochain de la vie politique, ce qui ouvre le jeu présidentiel pour sa fille, Sara Duterte-Carpio.
Rodrigo Duterte et sa fille Sara Duterte-Carpio lors de la cérémonie de couronnement de l'empereur Naruhito à Tokyo, le 22 octobre 2019. (Carl Court/REUTERS)
par AFP
publié le 2 octobre 2021 à 14h54

Le président philippin Rodrigo Duterte a annoncé samedi son prochain retrait de la vie politique après avoir renoncé contre toute attente à la vice-présidence, laissant la voie libre à sa fille pour lui succéder éventuellement à la tête du pays. Duterte a fait cette annonce à l’endroit même où il devait enregistrer sa candidature. Le dirigeant connu pour son franc-parler s’est bien gardé de préciser à quelle date il entendait quitter la vie politique. Il n’a pas non plus fait état de la personne qu’il souhaitait voir lui succéder à la présidence, mais beaucoup spéculent sur la candidature de Sara, sa fille, qui appartient à un autre parti et qui est actuellement la mieux placée dans les sondages.

Le président sortant demeure presque aussi populaire, selon les sondages, que lorsqu’il a remporté la présidentielle en 2016 en promettant notamment de mettre fin aux problèmes de la drogue. La Constitution lui interdit cependant de briguer un second mandat de six ans, au terme d’un scrutin qui devrait attirer plus de 60 millions d’électeurs. Ce qui ne l’a pas empêché d’entretenir le doute dans l’esprit de ses partisans pendant tout l’été. «Le sentiment dominant […] chez les Philippins, est que je ne suis pas qualifié et que ce serait enfreindre la Constitution» que de se présenter à la vice-présidence, a justifié Duterte, 76 ans, samedi.

Fin août, celui qui gouverne l’archipel de manière autoritaire avait annoncé sa candidature à la vice-présidence du pays pour les élections de mai 2022, entendant ainsi continuer sa «croisade» contre la drogue et les rebelles. Cette nouvelle avait aussitôt été dénoncée par l’opposition qui y a vu un «écran de fumée» et une parade contre d’éventuelles poursuites judiciaires.

Mais un récent sondage, réalisé par PulseAsia Research, a montré que Duterte avait reculé, figurant désormais en deuxième position parmi les vice-présidents préférés. Selon un autre sondage réalisé par Social Weather Stations, 60 % des Philippins ne pensent pas que la candidature de l’actuel chef de l’Etat à la vice-présidence est conforme à l’esprit de la Constitution.

Si Sara Duterte-Carpio était élue à la fonction suprême, elle pourrait contribuer à protéger son père de poursuites pénales dans son pays mais également de celles engagées à son encontre par la Cour pénale internationale (CPI). Cette dernière a donné en septembre le feu vert pour enquêter sur la campagne de lutte contre le trafic de drogue menée par le gouvernement et marquée par des milliers de meurtres commis par les forces de l’ordre.

Saison électorale

Sara Duterte-Carpio, qui occupe la fonction de maire de la ville de Davao (Sud) – un poste occupé par son père avant qu’il devienne président –, avait affirmé ne pas vouloir se présenter si son père briguait la vice-présidence.

Le coup d’envoi de la saison électorale a été donné vendredi aux Philippines avec des milliers de candidats pour des postes allant de président à conseiller municipal. Une procédure d’inscription d’une semaine marque le début de sept mois de campagne pour plus de 18 000 postes, mais la pandémie et la misère économique entraînée par les confinements répétés pourraient cette année en atténuer l’atmosphère festive.

Cependant, si la fille du président ne dépose pas sa candidature avant la date limite du 8 octobre, elle a encore jusqu’au 15 novembre pour se lancer dans la course à la présidentielle, comme son père l’a fait en 2015.

Parmi les principaux candidats à la présidence figurent un allié de M. Duterte, Ferdinand «Bongbong» Marcos, fils et homonyme de l’ancien dictateur du pays, ainsi que l’ex-acteur et maire de Manille Francisco Domagoso, connu sous son pseudonyme Isko Moreno. Le boxeur superstar Manny Pacquiao, qui vient de raccrocher les gants, a pour sa part enregistré vendredi sa candidature à la présidence.