Un accroc aussi sérieux qu’extraordinaire dans une cérémonie bien huilée destinée à consacrer l’autocrate Xi Jinpig. L’ancien président Hu Jintao a été escorté contre son gré vers la sortie, samedi 22 octobre, lors de la cérémonie de clôture du congrès du Parti communiste, un incident très inhabituel. Selon un media officiel qui a communiqué dans la soirée, Hu Jintao aurait été fermement exfiltré car il «ne se sentait pas bien».
La scène, observée et filmée par des journalistes de l’AFP, n’a pas été expliquée ni rapportée par les médias d’Etat. Toute référence récente au nom de l’ancien président semblait avoir été censurée sur l’internet chinois.
Hu Jintao, qui a présidé la Chine de 2003 à 2013 et est considéré comme un réformateur, a été incité par des employés à se lever de son siège, situé à côté de Xi Jinping au premier rang du Palais du peuple. Un employé tente de prendre par le bras l’ex-président de 79 ans, qui paraît affaibli, mais ce dernier refuse.
Cet homme essaie ensuite de le soulever par les aisselles, mais le prédécesseur de Xi Jinping continue à résister. Hu Jintao tente d’embarquer des documents posés sur son pupitre, qui semblent appartenir au numéro un chinois. Xi Jinping les tient fermement.
Assistance impassible
S’ensuit une conversation d’environ une minute entre l’employé et Hu Jintao. Ce dernier se laisse finalement convaincre de quitter les lieux, visiblement à contrecœur. Tenu au bras, l’ancien président est escorté vers la sortie, laissant une chaise vide à côté de Xi Jinping.
Aucune explication officielle n’a été donnée pendant plusieurs heures ? Les demandes de l’AFP auprès des autorités sont restées sans réponse. Jusqu’à ce qu’un média officiel n’affirme que l’ex-président chinois Hu Jintao «ne se sentait pas bien» à sa sortie du congrès du parti.
Au moment de se lever, Hu Jintao a un bref échange avec Xi Jinping, qui lui répond sans le regarder, et avec le Premier ministre Li Keqiang, à qui il donne une tape amicale à l’épaule. L’assistance reste impassible.
Hu Jintao avait surpris à l’ouverture du congrès dimanche dernier en apparaissant vieilli, la chevelure désormais totalement blanche. Cette séquence a eu lieu peu après l’entrée de la presse au Palais du peuple à Pékin pour couvrir la cérémonie de clôture du congrès du Parti communiste chinois (PCC).
Elle est survenue juste avant le vote unanime, par les quelque 2 300 délégués du PCC, pour intégrer à la charte du parti le «rôle central» de Xi Jinping.
«Humiliation complète»
«On ne sait pas encore ce qui a provoqué cela, s’il s’agissait de contrer le pouvoir de Xi ou d’un moment désagréable pour une personne âgée», commente Neil Thomas, analyste du cabinet Eurasia Group.
«En l’absence d’informations supplémentaires, c’est difficile de tirer des conclusions sur le rapport entre cet incident et la politique chinoise», précise ce dernier. «Que ce soit délibéré, ou qu’il ait été souffrant, l’effet est le même. Une humiliation complète pour la dernière génération de dirigeants d’avant Xi», a tweeté Alex White, analyste britannique ayant vécu en Chine.
Samedi après-midi, le nom «Hu Jintao» paraissait censuré sur le réseau social Weibo. Seules des informations de la veille, et provenant de comptes officiels, étaient disponibles.
Xi Jinping, 69 ans, devrait obtenir dimanche un troisième mandat comme secrétaire général du parti, ce qui l’assure d’un troisième mandat présidentiel en mars prochain. Arrivé à la tête de la Chine en 2012, il a concentré les pouvoirs pour devenir peu à peu le dirigeant le plus puissant depuis le fondateur du régime Mao Tse-toung (1949-76). Affichant une grande fermeté contre toute forme de dissidence, Xi Jinping a aussi mené une redoutable campagne anti-corruption qui lui a permis de faire le ménage parmi ses rivaux.
Mise à jour à 17h15 avec l’information communiquée dans la soirée par un media officiel sur les raisons de la sortie de Hu Jintao.