Il y a deux types de touristes qui visitent le Kazakhstan : les fous de nature, et les adeptes du dark tourism. Les premiers explorent les steppes pour goûter au mode de vie nomade ; les seconds, pour scruter les traces de la répression soviétique. Entre 1920 et 1960, des millions de déportés ont été envoyés dans les camps de travail disséminés à travers le territoire kazakhstanais, alors surnommé «la prison de l’URSS». Opposants politiques, intellectuels, artistes – les «ennemis du peuple» – travaillaient dans les mines, les chantiers ou les fermes au service de l’économie soviétique. Le nombre de morts est incertain, mais il se compte en millions.
Plus de soixante-dix ans après la mort de l’architecte de ce système, Joseph Staline, l’archipel du goulag est partout et nulle part à la fois. Aucun panneau ne signale le musée de la Mémoire des victimes des répressions politiques, à Dolinka, dans la région de Karaganda, à trois heures de route de la capitale, Astana. Il occupe pourtant l’ancien siège du Karlag, le plus vaste camp de l’Union soviétique. «Grand comme la Belgique», peut-on lire dans les guides.
A la périphérie d’Astana, un second musée, Alzhir, a été construit sur les ruines du camp pour femmes d’Akmola, où 18 000 d’entre elles furent détenues pour avoir épousé des «traîtres à la patrie». Notés 7/10 sur le «darkomètre», l’échelle de la noirceur du site dark-tourism.com, les lieux sont «sombres, peut-être trop pour certaines pers