Attaquée sur ses origines (elle est née de parents ukrainiens), Carolina Shiino a fini par renoncer à son titre de Miss Japon pour une autre raison : la révélation par un magazine qu’elle entretenait une relation sentimentale avec un homme marié. Ce qu’elle a confirmé. Sitôt élue, le 22 janvier, la mannequin de 26 ans avait fait l’objet de nombreux commentaires qui lui reprochaient de ne «pas être assez japonaise». Beaucoup d’attaques étaient anonymes mais certaines émanaient de personnalités comme la dessinatrice de mangas Mayumi Kurata, qui avait réagi sur X : «Carolina Shiino est très belle […] mais sa beauté ne représente pas le peuple japonais.»
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Miss Japon avait répondu, dans un parfait japonais, que vivant dans l’archipel depuis l’âge de 5 ans et le remariage de sa mère avec un citoyen nippon (dont elle porte le nom), elle avait adopté la mentalité et les valeurs du pays. «Je me sens japonaise, c’est un fait, personne n’a le droit d’affirmer le contraire», avait-elle plaidé dans une interview au journal The Japan Times.
«Un état de confusion et de peur»
Alors que la polémique s’éteignait et qu’une partie de l’opinion avait pris fait et cause pour la jeune femme, une nouvelle attaque est venue le 31 janvier de l’hebdomadaire Shukan Bunshun, spécialisé dans les scandales. Le tabloïd indiquait assuré que Carolina Shiino entretenait une liaison avec un médecin marié. Le comité Miss Japon avait défendu sa reine de beauté en affirmant qu’elle ignorait le statut marital de son compagnon, avant que l‘intéressée ne confirme le scoop. «Je me suis tue, car j’étais dans un état de confusion et de peur», a-t-elle expliqué.
Lundi, l’organisation a annoncé que Miss Japon avait renoncé à son diadème, et précisé qu’aucune remplaçante ne serait nommée. Désigner à sa place sa première dauphine aurait en effet donné raison aux xénophobes. Le titre restera donc vacant en 2024, et l’archipel ne sera pas représenté dans les concours internationaux, dont le plus médiatique, Miss Univers, programmé pour la fin de l’année.
L’affaire illustre la toute-puissance du Shukan Shunbun, populairement appelé le «canon Shunbun» car il tire à boulets rouges sur ses cibles, personnalités politiques ou célébrités du spectacle. Carolina Shiino rejoint un tableau de chasse bien garni, où figurent l’humoriste Ken Watabe, stigmatisé pour ses infidélités, ou le girls band Onyako Club, contraint à la dissolution après la publication d’une photo où plusieurs membres du groupe avaient une cigarette aux lèvres.
L’addiction d’un procureur aux cercles de jeux clandestins ou la lettre laissée par un haut fonctionnaire des Finances avant son suicide ont alimenté la très rentable machine, peut-on lire sur le site nipppon.com. Selon une méthode bien rodée, le Shukan Shunbun publie ses révélations chaque jeudi, mais en offre la primeur la veille sur son site, en accès payant. Un article «croustillant» peut ainsi rapporter en une journée des centaines de millions de yens (1 000 yens représentent 6,28 euros).