La fin d’une angoissante attente de près de 18 ans. La France et l’Indonésie ont signé vendredi un accord portant sur le transfèrement vers Paris de Serge Atlaoui, un Français condamné à mort en Indonésie en 2007 pour trafic de drogue. Une avancée qui suit la requête formulée le 19 décembre 2024 par la France, qui avait exigé le rapatriement du soudeur mosellan après avoir constaté la dégradation de son état de santé. Selon Yusril Ihza Mahendra, ministre indonésien en charge des Affaires juridiques et des Droits humains, l’arrivée du ressortissant de 61 ans doit avoir lieu le 4 février.
Son sort en France encore incertain
La signature de l’accord de transfèrement, prévue initialement mercredi, avait été repoussée une première fois à jeudi, pour des raisons de calendrier, selon une source proche des discussions, puis à vendredi. «Nous venons de signer un accord technique entre le gouvernement indonésien et la République française […] pour transférer un citoyen français du nom de Serge Atlaoui», a déclaré Monsieur Yusril lors d’un point presse, en présence de l’ambassadeur de France en Indonésie, Fabien Penone. Ce dernier a remercié «infiniment» le ministre «au nom des autorités françaises» pour cette décision.
Maintien en prison, peine alternative ou libération : les détails du sort de Serge Atlaoui une fois qu’il sera arrivé sur le sol français, présents dans l’accord, n’ont pas été dévoilés. Le ministre Yusril a simplement précisé que c’est la France qui déciderait du statut de son ressortissant, selon ses lois, qu’il s’agisse d’une grâce ou d’une peine de trente ans de prison.
«C’est évidemment un grand soulagement d’avoir enfin connaissance de l’accord conclu entre la France et l’Indonésie et visant au transfert de Serge» s’est réjoui pour l’AFP Richard Sédillot, son avocat. «Ces derniers jours ont été difficiles, puisque la conclusion de l’accord a été reportée à plusieurs reprises», a-t-il ajouté, depuis la France, indiquant qu’il allait «maintenant poursuivre en France [son] assistance auprès de Serge».
Serge Atlaoui avait été arrêté en 2005 dans une usine où de la drogue avait été découverte, en banlieue de Jakarta, et les autorités l’avaient accusé d’être un «chimiste». Protestant de son innocence, l’artisan venu de Metz, père de quatre enfants, s’est toujours défendu d’être un trafiquant de drogue, affirmant qu’il n’avait fait qu’installer des machines industrielles dans ce qu’il croyait être une usine d’acrylique. L’affaire avait fait grand bruit en Indonésie, où la législation antidrogue est l’une des plus sévères du monde.
Condamné à mort en appel
Initialement condamné à la prison à vie, il avait vu la Cour suprême alourdir la sentence et le condamner à la peine capitale en appel. Il devait être exécuté aux côtés de huit autres condamnés en 2015, mais a obtenu un sursis après que Paris a intensifié la pression, les autorités indonésiennes ayant accepté de laisser un appel en suspens suivre son cours. Malade et transféré dans la prison de Salemba, à Jakarta, il a suivi jusqu’à récemment chaque semaine un traitement dans un hôpital de la capitale.
Droits humains
L’Indonésie compte actuellement au moins 530 condamnés dans le couloir de la mort, selon l’association de défense des droits Kontras, citant des données officielles. Parmi eux, plus de 90 étrangers, dont au moins une femme, selon le ministère de l’Immigration et des services correctionnels. Une Philippine de 39 ans, Mary Jane Veloso, arrêtée en 2010 et également condamnée à la peine capitale pour trafic de drogue, a été rapatriée aux Philippines à la mi-décembre, après un accord entre les deux pays.
Un autre Français, Félix Dorfin, arrêté sur l’île touristique de Lombok, avait été condamné, au-delà des réquisitions, à la peine de mort en 2019, également pour un trafic de drogue qu’il a toujours nié. La sentence a ensuite été commuée en une peine de 19 années d’emprisonnement qu’il purge actuellement. Auparavant, c’est le cuisiner savoyard Michaël Blanc, arrêté en 1999 à l’âge de 26 ans avec 3,8 kilos de haschisch dans des bouteilles de plongées, qui avait écopé d’une peine de prison à perpétuité. Il avait passé quinze ans en prison avant de bénéficier d’une libération conditionnelle et d’être autorisé à quitter le pays en 2018.
Selon l’ONG Ensemble contre la peine de mort (ECPM), dont le siège se trouve à Paris, au moins quatre autres Français sont actuellement condamnés à mort dans le monde : deux hommes au Maroc, un en Chine ainsi qu’une femme en Algérie.
Mise à jour vendredi 24 janvier avec la signature de l’accord puis avec le contenu de la conférence de presse