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Témoignages

Insein, le visage carcéral de la junte birmane

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Les huit anciens prisonniers de l’immense complexe du nord de Rangoun, rencontrés par «Libération», racontent un quotidien de sévices, de privations, de maladies dans la prison surpeuplée depuis le coup d’Etat du 1er février.
Le reporter Yuki Kitazumi a pu rentrer à Tokyo après sa libération, le 13 mai. (Solène Ballesta/Libération)
publié le 15 novembre 2021 à 7h35

Quatre murs de brique, un trou pour déféquer et des colonies de fourmis. Incarcéré à l’isolement à la prison d’Insein, le journaliste japonais Yuki Kitazumi dormait sur une planche couverte de plastique, dans une cellule de 10 mètres carrés datant de la période coloniale. «La brique était si épaisse qu’on hurlait pour se parler», se souvient le reporter de 45 ans, arrêté le 18 avril pour avoir enfreint l’article 505 (a) du code pénal birman, qui sanctionne de plusieurs années de prison, sous des contours très flous, la propagation de fausses nouvelles et les incitations à la désobéissance civile. Un mois plus tard, il était expulsé vers le Japon, d’où il témoigne aujourd’hui pour Libération.

Pour tuer l’ennui, le journaliste grattait ses souvenirs sur des bouts de papier, avec une plume d’oiseau et du café instantané. Une cloche sonnait toutes les quinze minutes, pour que les détenus gardent la notion du temps. Derrière sa cellule, des cris stridents collaient le frisson. Le quartier des mères. «J’entendais les enfants, les bébés nés en détention.»

Au nord-ouest de Rangoun, la prison d’Insein renferme une large partie des 7 000 opposants toujours détenus par la junte militaire depuis le coup d’Etat, selon