La Prix Nobel de la paix iranienne, Narges Mohammadi, incarcérée à Téhéran depuis novembre 2021, a été libérée mercredi pour trois semaines pour des raisons médicales, a annoncé sa défense sur X. «Selon l’avis du médecin légiste, le parquet de Téhéran a suspendu l’exécution de la peine de Narges Mohammadi pour trois semaines et elle a été libérée de prison», a indiqué son avocat, Me Mostafa Nili. «La raison de sa libération est son état physique après l’ablation d’une tumeur et une greffe osseuse, réalisées il y a vingt et un jours», a souligné Me Nili. Et de poursuivre : «La tumeur retirée était bénigne, mais [Narges Mohammadi] doit être examinée tous les trois mois.»
Témoignage exceptionnel
Son mari, Taghi Rahmani, affirme qu’elle est sortie de prison en scandant «Femme, Vie, Liberté», le slogan du soulèvement populaire en Iran. «Elle est sortie avec un bon état d’esprit, un état combatif malgré son état de santé très fragilisé», a-t-il relaté en visioconférence depuis le Mexique, lors d’une conférence de presse organisée à Paris par les soutiens de la militante iranienne.
Libération temporaire «insuffisante»
Cette libération temporaire jugée «insuffisante», ont réagi ce mercredi ses proches et soutiens, réclamant sa «libération inconditionnelle» ou «au moins une suspension de trois mois». «Après une décennie d’emprisonnement, Narges a besoin de soins médicaux spécialisés dans un environnement sûr», a martelé la Fondation Narges Mohammadi dans un communiqué.
L’ONU comme le comité Nobel ont également appelé ce mercredi après-midi les autorités iraniennes à la libérer définitivement. Thameen al-Kheetan, un porte-parole du Haut-Commissariat de l’ONU aux droits de l’homme, réclame ainsi la «libération immédiate et inconditionnelle» de Narges Mohammadi, même s’il juge «important» qu’elle ait été remise temporairement en liberté ce mercredi pour raison médicale. Et d’ajouter : «Nous réitérons notre appel à la libération immédiate et inconditionnelle de Mme Mohammadi, ainsi que de toutes les Iraniennes et de tous les Iraniens qui sont détenus ou emprisonnés pour avoir légitimement exercé leur liberté d’expression et d’autres droits de l’homme.»
«Nous demandons aux autorités iraniennes de mettre un terme définitif à son emprisonnement et de veiller à ce qu’elle reçoive un traitement médical adéquat pour ses maladies», a pour sa part réagi le président du comité Nobel, Jørgen Watne Frydnes, lors d’une conférence de presse à Oslo.
Combat sans relâche contre l’obligation de porter le voile et la peine de mort
La défenseuse des droits humains de 52 ans a été maintes fois condamnée et emprisonnée depuis vingt-cinq ans pour son engagement. Narges Mohammadi, qui avait reçu son Nobel en 2023, se bat sans relâche pour défendre les droits des femmes, en militant contre l’obligation de porter le voile, imposée depuis l’instauration de la Révolution islamique en 1979, mais aussi contre la peine de mort.
Même en prison, la militante continuait de dénoncer des injustices : en septembre, elle avait ainsi appelé la communauté internationale à «sortir du silence et de l’inaction» face à l’oppression des femmes en Iran, deux ans exactement après le déclenchement du mouvement «Femme, Vie, Liberté».
En juin, la militante iranienne avait été condamnée à une nouvelle peine d’un an de prison pour «propagande contre l’Etat». Elle avait refusé d’assister à l’audience de son procès après avoir demandé, sans succès, que celui-ci soit ouvert au public. En mars, la militante avait en outre diffusé un message audio depuis sa prison, dans lequel elle dénonçait une «guerre à grande échelle contre les femmes» dans la République islamique.
Mis à jour à 13 heures avec la réaction du comité de soutien ; à 15h37 avec la réaction du comité Nobel ; à 16 h 03 avec les propos du mari de Narges Mohammadi ; à 18 heures avec la réaction de l’ONU.