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Escalade

La Corée du Nord tire des missiles en direction du Sud, Washington l’exhorte à cesser ses actions «déstabilisatrices»

Corée du Nord, l'escaladedossier
Pyongyang a tiré environ 200 obus d’artillerie au large de sa côte ouest, atterrissant non loin de la ligne de séparation maritime des deux Corée. La Corée du Sud prévient qu’il répondra par des mesures «appropriées», tandis que Washington hausse le ton.
publié le 5 janvier 2024 à 8h07
(mis à jour le 5 janvier 2024 à 20h36)

La tension monte en mer Jaune. Les Etats-Unis exhortent ce vendredi 5 janvier la Corée du Nord à cesser ses actions «déstabilisatrices», à reprendre la diplomatie et «à s’abstenir de toute nouvelle provocation» par la voix du porte-parole du département d’Etat américain Matthew Miller. Plus tôt dans la journée, Pyongyang a tiré des centaines d’obus en mer Jaune près d’îles sud-coréennes reculées.

Séoul a ordonné en conséquence l’évacuation des habitants des îles de Yeonpyeong et de Baengnyeong situées près de la Corée du Nord, après que Pyongyang a tiré environ 200 obus d’artillerie au large de sa côte ouest. La riposte ne s’est pas trop fait attendre avec un exercice à munitions réelles mené à Yeonpyeong dans la foulée par la Corée du Sud.

«L’armée nord-coréenne a effectué plus de 200 tirs aujourd’hui entre [1 heure et 3 heures du matin, heure de Paris] dans les zones de Jangsan-got dans le nord de l’île de Baengnyeong et dans le Nord […] de l’île de Yeonpyeong», a déclaré un responsable du ministère de la Défense. Le ministère a précisé que les tirs n’avaient fait ni victime ni dégâts, les obus étant tombés au nord de la frontière maritime de facto, dénommée «Ligne de limite du nord» (NLL).

Un peu plus tard, la Corée du Nord a affirmé que ses tirs d’obus près de ces deux îles sud-coréennes constituaient «une réponse naturelle et une contre-mesure» aux exercices militaires menés par Séoul, selon le média d’état KCNA. Les tirs d’exercices de Pyongyang n’ont «même pas eu d’impact indirect dans les îles Yeonpyeong et Baengnyeong», a ajouté l’agence nord-coréenne.

Evacuations

Les habitants de ces deux îles frontalières sud-coréennes, situées en mer Jaune, ont toutefois été priés d’évacuer, selon des responsables locaux. Les autorités de l’île de Yeonpyeong, comptant environ 2 000 habitants, ont déclaré que l’ordre d’évacuation avait été émis à titre de «mesure préventive». «Nous faisons des annonces d’évacuation en ce moment», a pour sa part affirmé un responsable de district de l’île de Baengnyeong (nord-ouest), ajoutant être au courant de la conduite à venir d’un exercice naval par l’armée sud-coréenne. Les ferries reliant ces îles ont également été suspendus.

Dans la foulée du barrage d’artillerie de Pyongyang, la Corée du Sud a dénoncé un «acte de provocation», pressant son voisin d’y mettre un terme et prévenant qu’il répondra par des mesures «appropriées».

«Nous avertissons sévèrement que la Corée du Nord porte l’entière responsabilité de cette escalade de la crise et nous l’exhortons à cesser immédiatement ces actions», a écrit le ministère sud-coréen de la Défense dans un communiqué. «Notre armée suit et surveille de près la situation en étroite coordination avec les Etats-Unis», a-t-il ajouté.

La Chine, alliée de la Corée du Nord, appelle de son côté «à la retenue» et espère que les parties «s’abstiendront de prendre des mesures qui aggravent les tensions (et) qu’elles éviteront une nouvelle escalade», a commenté un porte-parole de la diplomatie chinoise, Wang Wenbin, interrogé lors d’un point presse.

Une escalade sérieuse

Cette escalade militaire est une des plus sérieuses sur la péninsule depuis 2010, quand le Nord avait bombardé Yeonpyeong de 170 obus d’artillerie, faisant quatre morts dont deux civils lors de la première attaque nord-coréenne contre des civils depuis la guerre de Corée (1950-1953). Cette nouvelle attaque survient après une salve de déclarations belliqueuses du dirigeant nord-coréen Kim Jong Un, qui a notamment menacé ces derniers jours d’«anéantir» la Corée du Sud et les Etats-Unis.

Les deux Corée ont entamé en 2018 un processus de rapprochement, caractérisé par trois rencontres entre Kim Jong Un et le président sud-coréen de l’époque, Moon Jae-in. Mais les relations entre les deux Corée se sont détériorées jusqu’à atteindre un point bas cette année après le lancement d’un satellite espion par Pyongyang, qui a poussé Séoul à suspendre partiellement un accord militaire de 2018 visant à désamorcer les tensions.

Au terme d’une réunion du comité central du Parti des travailleurs de Corée, fin décembre, le dirigeant nord-coréen Kim Jong-un avait ordonné l’accélération des préparatifs militaires en vue d’une «guerre» qui pouvait «être déclenchée à tout moment» sur la péninsule. Lors de la réunion du parti, le dirigeant a affirmé ne plus rechercher la réconciliation et la réunification avec la Corée du Sud, soulignant la «situation de crise persistante et incontrôlable» qui, selon lui, a été déclenchée par Séoul et Washington.

En 2023, la Corée du Nord a procédé à un nombre record d’essais de missiles balistiques, en violation de nombreuses résolutions de l’ONU le lui interdisant. Le pays a également gravé dans sa Constitution son statut de puissance nucléaire, et a testé avec succès le Hwasong-18, le missile balistique intercontinental (ICBM) le plus puissant de son arsenal, capable d’atteindre les Etats-Unis.

Mis à jour à 20 heures 28 avec les déclarations de Pyongyang dans le média d’Etat KCNA et la réaction de Washington.