Dans l’aube fraîche et polluée de Kaboul, au fond d’une cour délabrée, douze jeunes filles dissertent de géographie. Des éclats de voix aiguë s’échappent de l’obscure bâtisse en pisé. «La rivière Helmand est la plus longue d’Afghanistan, elle mesure 1 100 kilomètres de long. Elle se tarit d’année en année, entraînant de terribles sécheresses…» récite à haute voix Amina, 15 ans. L’adolescente aux yeux clairs suit de son index le tracé sinueux du cours d’eau sur une carte fanée. «Très bien», se réjouit Morsal, 18 ans, visage gracile au large sourire. La professeure improvisée officie depuis trois mois, à raison de cent afghanis par semaine et par élève – moins d’un euro. Une reconversion inattendue : élève en terminale, la fille d’anciens paysans se rêvait ingénieure. Mais les bouleversements récents ont réduit ce scénario «en poudre de cendres», résume-t-elle. Depuis leur prise de pouvoir le 15 août, les talibans interdisent aux jeunes filles au-dessus du grade 6, l’équivalent de la sixième en France, de poursuivre leur scolarité. Pour des millions de collégiennes, lycéennes et étudiantes, l’horizon s’est soudainement heurté aux murs de leurs foyers. Les garçons, eux, ont repris les cours début septembre, à l’exception des universités publiques.
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Face à Morsal, Amina semble presque ravie de s