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Addiction

L’Indonésie déclare la guerre aux jeux en ligne, une «nouvelle épidémie sociale»

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Depuis l’an dernier, le pays a enregistré 14 suicides liés aux jeux d’argent en ligne, pourtant illégaux. Face à ce fléau qui gangrène la société, touchant aussi bien les jeunes que les élites, le gouvernement indonésien promet d’agir.
Plus de 3,2 millions d’Indonésiens se sont adonnés à des jeux d’argent, en ligne ou en personne, une activité pourtant illégale dans le pays. (boonchai wedmakawand/Getty Images)
par Marion Zipfel, correspondante en Indonésie
publié le 30 juin 2024 à 9h25

«J’ai découvert les jeux en ligne lorsque je suis retourné dans mon village en 2019 pour des vacances», raconte Adi. Chauffeur privé pour une famille de Surabaya, dans l’est de Java, il menait jusque-là une vie confortable avec son salaire mensuel de près de 4 millions de roupies (environ 230 euros). «Après avoir travaillé dans les champs, les hommes du village se retrouvent au warung [sorte de cabane autour de laquelle on vient socialiser et se restaurer en Indonésie et en Malaisie, ndlr] pour boire des cafés et jouer sur leurs téléphones, explique-t-il. Ils m’ont fait découvrir le jeu de domino et j’ai commencé à jouer pour m’amuser.»

De retour à Surabaya, il se met à jouer plus régulièrement. Le loisir tourne à l’obsession. «Dès que je ne conduisais pas, je jouais, et très vite, je suis devenu accro.» Il commence par financer son addiction grâce à ses économies mais rapidement, les sommes deviennent plus conséquentes, pouvant représenter jusqu’à 10 % de son salaire. «J’essayais de le cacher à ma femme, explique le jeune homme. Elle s’en est rendu compte lorsque j’ai commencé à vendre ses bijoux et elle m’a quitté en 2023.» L’homme s’enfonce alors dans une spirale infernale, emprunte de l’argent à sa famille, ses amis, mais également des prêteurs sur gage en ligne. «Aujourd’hui, je n’ai plus rien, explique Adi d’un ton impassible. Je n’ai même plus de mobylette.»

Suicides et homicides

Comme lui, plus de 3,2 millions d’Indonésiens se s