Jour après jour, l’ampleur de la catastrophe se dessine. Selon un nouveau bilan communiqué par les autorités du pays ce lundi 27 mai 2024, plus de 2 000 personnes ont été ensevelies vivantes dans le vaste glissement de terrain qui a touché plusieurs villages dans une région montagneuse de Papouasie-Nouvelle-Guinée. La veille, un responsable des Nations unies évoquait 670 personnes tuées, et plus de 150 maisons submergées.
Le drame s’est déroulé dans la nuit de jeudi à vendredi, vers 3 heures du matin vendredi (jeudi soir en France), lorsqu’un pan du mont Mungalo s’est effondré sur un village à flanc de colline de la province d’Enga, au centre de l’archipel, surprenant les habitants dans leur sommeil. Dans une vidéo qui circule sur les réseaux sociaux, on voit la montagne continuer de s’effriter, créant un nuage de poussière au pied de la falaise. Plus bas, des restes d’habitation jonchent le sol. «Il n’y avait aucune trace de survivants dans les champs de débris boueux et rocailleux», raconte le quotidien local Post-Courrier ce lundi, qui ajoute que «tous les survivants sont en état de choc».
More than 2,000 people were buried alive in the landslide that smothered a Papua New Guinea village and work camp on Friday in the country’s remote northern highlands, the authorities told the United Nations on Monday. https://t.co/hmQXYP2kuw pic.twitter.com/5tPEYGwBZ4
— The New York Times (@nytimes) May 27, 2024
Quatre jours après le drame, «la situation reste très instable», insiste auprès de Libération Niels Kraaier, porte-parole de l’Unicef en Papouasie-Nouvelle-Guinée. Et de nombreuses questions demeurent, notamment sur le bilan humain : selon les informations dont dispose le porte-parole ce lundi, «environ 3 895 personnes ont été directement touchées par la catastrophe, d’une manière ou d’une autre». Le nombre exact de victimes, lui, reste «très difficile à déterminer». «Le pays est immense, et les infrastructures assez médiocres. Il est donc assez difficile d’envoyer des gens sur place, et même de communiquer pour se tenir au courant», poursuit-il.
Ce lundi, secours et ONG continuent de s’activer sur le terrain, aux côtés des forces de l’ordre, de l’armée et des autorités locales. «Evidemment, la toute première priorité est de sauver autant de vies que possible, assure Niels Kraaier. Mais aussi de stabiliser la situation, c’est-à-dire de faire en sorte que les personnes présentes aient suffisamment à manger et à boire.»
Les conditions difficiles pour les secours
Le travail des secouristes est laborieux, entravé par plusieurs problèmes de taille. A commencer par les conditions dangereuses, alors que des pierres «continuent de tomber et de faire bouger le sol», alerte auprès de l’AFP Serhan Aktoprak, chef de mission de l’Organisation internationale pour les migrations en Papouasie-Nouvelle-Guinée. «Pour ne rien arranger, des eaux souterraines s’écoulent sous les débris, transformant la surface du sol en toboggan», a-t-il ajouté.
Reportage
Une situation non seulement risquée pour les équipes de secours et les habitants, mais qui pourrait aussi «déclencher un nouveau glissement» de terrain, estime le responsable de l’ONU. «Il y a encore d’autres blocs sur la pente qui semblent être potentiellement instables et qui génèrent de petits glissements en ce moment», confirme auprès de Libé David Petley, géologue spécialisé dans les glissements de terrain et vice-chancelier de l’université de Hull, au Royaume-Uni. Avec aussi le risque «que la pente très raide à l’arrière du glissement de terrain s’effondre».
Le lieu de la catastrophe complique aussi les interventions des secours. «Il s’agit d’une région très isolée et difficile d’accès, située à 600 km de la capitale, Port Moresby», souligne Niels Kraaier. Le porte-parole de l’Unicef en Papouasie-Nouvelle-Guinée déplore ainsi «la difficulté de faire venir des machines sur place». Alors dans certains endroits, «des gens doivent creuser à mains nues» à la recherche de survivants, ce qui rend le processus très lent et laborieux, complète-t-il.
L’origine du drame encore incertaine
Pour l’heure, difficile de savoir avec certitude ce qui a provoqué une telle catastrophe. «Les glissements de terrain sont généralement déclenchés par de fortes pluies, des tremblements de terre ou des activités humaines», affirme David Petley. Selon le géologue, «il n’y a pas de lien évident avec l’une ou l’autre de ces causes pour l’instant, mais l’explication la plus probable est que les pluies prolongées de ces derniers mois ont pu affaiblir la pente». Une hypothèse appuyée par les habitants des environs, qui assurent que le drame a été déclenché par de fortes précipitations ayant eu lieu ces dernières semaines.
Située au sud de l’équateur, la région au climat tropical essuie fréquemment des pluies torrentielles. En mars, 23 personnes avaient déjà été tuées dans un glissement de terrain survenu dans une province limitrophe de celle d’Enga et frappée par de violentes précipitations. Et dans le futur, la fréquence de ces catastrophes devrait encore s’accroître sous l’effet du réchauffement climatique : «Nous savons que les tempêtes de pluie les plus intenses sont de plus en plus fortes et qu’il y a donc davantage de risques de glissements de terrain», souligne David Petley.
Face à l’ampleur des dégâts, les autorités de la Papouasie-Nouvelle-Guinée ont appelé la communauté internationale à fournir de l’aide. Dimanche, Emmanuel Macron avait assuré que la France se tenait «prête à contribuer aux efforts de secours et de reconstruction», dans un message diffusé sur X (ex-Twitter). Joe Biden, Xi Jinping ou encore l’Organisation mondiale de la santé (OMS) ont eux aussi proposé leur soutien après le glissement de terrain meurtrier. «Nous sommes prêts à aider le gouvernement à répondre aux besoins urgents en matière de santé», a fait savoir sur X le patron de l’OMS, Tedros Adhanom Ghebreyesus, ce lundi. De son côté, l’ONU a invité les pays membres à une réunion d’aide d’urgence en ligne mardi matin, selon l’ambassade de France à Port Moresby.