Dans un bar branché de Hanoï, Minh et ses amies rient aux éclats. Diplômée de la meilleure université d’économie, certifiée en anglais, la jeune femme travaille comme marketing manager dans une entreprise étrangère. A 22 ans, elle incarne une jeunesse vietnamienne moderne promise à la réussite. Le micro circule, la soirée karaoké bat son plein. Soudain, son téléphone s’allume : sa mère l’appelle. Il est 22 heures, Minh doit rentrer.
Elle invoque une «urgence au travail» et s’éclipse, gênée : «Tous les soirs, j’ai un couvre-feu. Cette pression familiale, c’est l’un des plus grands freins de ma vie. Mes parents veulent que je suive le modèle imposé : réussir mes études, m’occuper de la maison et me marier avant 25 ans.» Minh vit toujours chez ses parents : chaque jour, elle cuisine, nettoie, s’occupe de sa grand-mère. Des tâches «étouffantes», dit-elle. «Un jour, j’avais un entretien d’embauche important. Mais le repas n’était pas prêt. Je suis rentrée de moi-même : je savais que mon père ne ferait rien et que ma mère, déjà épuisée, ne pourrait pas tout assumer seule.»