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Chute de la natalité mondiale : la cause principale est l’insécurité financière plus que le refus de la parentalité, pointe un rapport de l’ONU

Un rapport des Nations Unies paru mardi 10 juin démontre que la baisse globale des taux de fécondité résulte principalement de facteurs socio-économiques, qui n’incitent pas les couples à procréer plus qu’un refus d’enfants.
L’enquête montre que seulement 12 % des répondants citent l’infertilité comme facteur limitant. (Benoit Durand/Hans Lucas)
publié le 12 juin 2025 à 13h14

C’est une tendance qui préoccupe le monde, et les institutions internationales : la baisse continue de la natalité à l’échelle mondiale. Or contrairement à ce que supposent les décideurs politiques, ce phénomène globalisé n’est pas dû au fait que les gens veulent moins d’enfants. Les travaux issus d’une étude onusienne publiés mardi, montrent en réalité qu’un nombre croissant de personnes refusent de fonder une famille en raison de la flambée du coût de la vie et de l’incertitude croissante quant à l’avenir.

«On suppose souvent, ou on sous-entend, que les taux de fécondité sont le résultat d’un libre choix. Malheureusement, ce n’est pas tout», est-il écrit en préambule de ce rapport piloté par l’UNFPA, l’agence des Nations Unies chargée des questions de santé sexuelle et reproductive, sur l’état de la population mondiale. Ce rapport, intitulé «La véritable crise de la fécondité : la quête de l’autonomie reproductive dans un monde en mutation», soutient que ce qui est réellement menacé n’est pas la natalité en tant que telle mais plutôt la capacité des individus à pouvoir choisir librement quand et s’ils veulent avoir des enfants.

Les conclusions de l’étude s’appuient sur une récente enquête menée par l’UNFPA et YouGov auprès de 14 000 personnes issues de 14 pays (Brésil, Allemagne, Hongrie, Inde, Indonésie, Italie, Corée du Sud, Mexique, Maroc, Thaïlande, Nigéria, Afrique du Sud, Suède et États-Unis), qui représentent plus d’un tiers (37 %) de la population mondiale.

L’agence onusienne constate que la sécurité financière est un enjeu majeur pour les personnes envisageant d’avoir des enfants. Elle est massivement évoquée — jusqu’à 58 % en Corée du Sud, contre 19 % seulement en Suède. L’enquête montre que seulement 12 % des répondants citent l’infertilité comme facteur limitant.

Au fil des pages, les auteurs démontent les discours culturels et politiques pro-natalistes, préoccupés par la baisse de la fécondité, et qui avancent que les jeunes générations, en particulier les femmes, ne veulent pas avoir d’enfants parce que cela interférerait avec leur style de vie ou par simple refus de la parentalité.

Améliorer la qualité de vie globale

Les experts cités dans le document soutiennent que ceux qui s’inquiètent de la stagnation ou du déclin des populations devraient avant tout considérer les conditions socio-économiques qui font que les gens doutent de pouvoir élever des enfants. «L’enquête montre que les gens veulent des enfants mais disent que les conditions ne sont pas bonnes», analyse auprès du New York Times Karen Guzzo, démographe à l’Université de Caroline du Nord, qui n’a pas pris part à cette étude.

Les démographes affirment en outre que les primes à la naissance et autres avantages à court terme offerts dans certains pays n’augmentent pas nécessairement la taille de la population parce qu’ils ne prennent pas en compte les problèmes structurels, comme la garde d’enfants et les coûts de logement. Le rapport estime que la meilleure façon d’accroître la natalité consiste à améliorer la qualité de vie globale.

Ces conclusions vont dans le même sens que les préconisations formulées en avril dernier par le Comité national d’éthique français. «L’autonomie dans la décision de fonder une famille doit être respectée, et ne pas être affectée par des pressions sociales ou politiques», soulignait alors dans une synthèse le Comité, qui a examiné les causes de la baisse des naissances ainsi que leurs implications sociales et éthiques.

En parallèle, «il est impératif que la société accompagne ceux qui rencontrent des difficultés à concrétiser» leur projet d’enfant, en raison de conditions socio-économiques défavorables, ajoutait l’organisme, alors qu’en France par exemple, les naissances sont au plus bas depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale. En 2024, 663 000 bébés ont vu le jour, soit 2,2 % de moins que l’année précédente, selon l’Insee. Le Comité d’éthique mettait aussi en lumière les mêmes facteurs socio-économiques, comme des difficultés à obtenir un emploi stable ou la «transformation du rôle des femmes dans la société».