Il est l’homme, selon CNN, par qui la trêve à Gaza n’a pas eu lieu. Alors que les négociations en cours depuis des semaines semblaient sur le point d’aboutir, Ahmed Abdel Khalek, un haut responsable des services de renseignement égyptiens, aurait discrètement modifié les termes d’une proposition de cessez-le-feu qu’Israël avait déjà signée au début du mois de mai. Faisant de facto échouer la libération des otages israéliens et des prisonniers palestiniens, et condamnant la perspective d’une fin temporaire des combats à Gaza.
Trois sources ont confié à la chaîne américaine, mercredi 22 mai, que l’accord de cessez-le-feu annoncé par le mouvement islamiste Hamas, le 6 mai, n’était pas celui que les Qataris ou les Américains pensaient avoir soumis pour examen final. Le document modifié – que le média américain s’est procuré – prévoyait un cessez-le-feu permanent et un «calme durable» à atteindre dans la deuxième phase du projet. Israël a sans surprise refusé cette proposition, notamment à cause de cette formule, le Premier ministre Benyamin Nétanyahou martelant depuis le début de son offensive qu’une «victoire écrasante» sur le Hamas est un préalable à toute cessation des hostilités, comme la libération des otages encore détenus.
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Le général Ahmed Abdel Khalek n’est autre que l’adjoint principal du chef des renseignements égyptiens, Abbas Kamel, qui a été l’homologue du directeur de la CIA, Bill Burns, dans les pourparlers de cessez-le-feu. Selon différents médias locaux, l’homme est chargé de la question palestinienne au sein de ces mêmes services depuis 2018. Une question qu’il connaissait déjà bien pour avoir notamment été conseiller à la représentation égyptienne dans les territoires palestiniens, puis pour avoir travaillé sur l’accord ayant conduit à la libération du caporal israélien Gilad Shalit, détenu à Gaza de 2006 à 2011, contre la libération d’un millier de prisonniers palestiniens.
«Péter un plomb»
Les changements apportés par ses soins ont provoqué une vague de colère et de protestation parmi les responsables américains, qataris et israéliens. «Nous avons tous été dupés», a déclaré l’une de ces trois sources contactées par CNN. Bill Burns, qui a piloté les efforts américains pour négocier une trêve, se trouvait dans la région lorsqu’il a appris que les Egyptiens avaient modifié les termes de l’accord. En colère et embarrassé, selon la chaîne américaine, il «a presque pété un plomb», alors qu’il est plutôt réputé pour être d’ordinaire mesuré.
Depuis ces révélations, l’Egypte a fait savoir son courroux. Le chef du service d’information de l’Etat, Diaa Rashwan, a déclaré mercredi 22 mai, dans un communiqué publié sur Facebook, que «l’allégation» de CNN ne «reposait sur aucune source journalistique fiable» et était «dépourvue de toute information ou fait». Ce scoop pourrait même «pousser la partie égyptienne à prendre la décision de se retirer totalement de la médiation qu’elle mène dans le conflit», a-t-il menacé. «Si les négociations reprennent, on s’attend à ce que les Qataris jouent un rôle plus important lors du prochain cycle», déclare, dans la même optique, une des trois sources de CNN. Tout en rappelant que l’Égypte devrait toujours compter, en raison de sa proximité essentielle avec le Hamas et car Israël préfère également échanger avec Le Caire plutôt qu’avec Doha.
Le cabinet de guerre israélien a de son côté donné son feu vert, ce jeudi 23 mai, à la reprise des négociations en vue de libérer des otages. Une décision qui survient après la diffusion d’une vidéo montrant l’enlèvement de soldates israéliennes par des combattants du Hamas le 7 octobre. Sur cette séquence d’un peu plus de trois minutes – extraite d’une vidéo de deux heures filmée en caméra embarquée par des commandos du Hamas –, selon les familles, on distingue des jeunes femmes, certaines le visage en sang, assises à terre en pyjama, les mains attachées dans le dos par leurs ravisseurs. Ces images vont «renforcer ma détermination à lutter de toutes mes forces jusqu’à l’élimination du Hamas, pour garantir que ce que nous avons vu ce soir ne se reproduira plus jamais», a réagi Benyamin Nétanyahou sur son compte Telegram.