Menu
Libération
Trafic

Contrebande de cigarettes à bord de ballons d’hélium : la Lituanie ferme temporairement ses frontières avec le Bélarus

La Première ministre Inga Ruginiene a annoncé ce lundi 27 octobre que la fermeture des frontières pourrait se prolonger dans le temps si Minsk ne faisait pas cesser ces «provocations».

La Première ministre lituanienne Inga Ruginiene à une session parlementaire à Vilnius, le 26 août 2025. (Mindaugas Kulbis/AP)
Publié le 27/10/2025 à 16h21

Un deal de cigarettes à bord d’une montgolfière ? La pratique est très fréquente depuis plusieurs mois au-dessus de la Lituanie, qui déplore la multiplication des survols de son territoire par des ballons météorologiques gonflés à l’hélium - 966 en 2024, et plus de 500 depuis le mois de janvier -, envoyés par des contrebandiers bélarusses vers le pays balte. A bord : des cigarettes au prix beaucoup moins élevé que dans l’Union européenne.

La semaine dernière, la Lituanie a observé la vague de ballons «la plus intense de cette année», selon le chef du Centre national de gestion de crises (NCMC). En réaction, la Première ministre lituanienne, Inga Ruginienė, a convoqué ce lundi 27 octobre une réunion de la Commission de sécurité nationale (NSC). «Nous sommes prêts à prendre les mesures les plus strictes en cas de violation de notre espace aérien», a-t-elle déclaré à l’issue de la réunion avant d’annoncer fermer temporairement ses frontières avec le Bélarus.

Elle a également indiqué qu’un plan d’action de la police et des gardes-frontières a été élaboré pour lutter contre les contrebandiers, relate le quotidien lituanien Lietuvos Rytas. «J’envoie un message à tous ceux qui souhaitent s’engager dans cette activité : nous aurons des actions actives cette semaine», a-t-elle averti. Depuis 2024, les gardes-frontières ont le droit d’abattre ce type de ballons s’ils les aperçoivent.

«Attaque hybride»

Cette mesure sera discutée en Conseil des ministres mercredi, et ne contient que quelques exceptions strictes : seuls les trajets diplomatiques ou ceux de citoyens européens seraient autorisés pour rejoindre le Bélarus ou en revenir. «Tous les autres déplacements seront interrompus. Cette mesure envoie un signal clair au Bélarus : aucune attaque hybride ne sera tolérée, et nous prendrons les mesures les plus strictes possibles pour arrêter de telles actions» a martelé la cheffe du gouvernement. Sur X, elle a appelé à «une réponse unie et résolue» face aux «autocrates qui testent une fois de plus la résilience de l’Union européenne et de l’Otan face aux menaces hybrides.»

Pour la même raison, la circulation avait été arrêtée la semaine dernière le temps d’une nuit sur deux postes-frontières terrestres entre la Lituanie et le Bélarus, à Medininkai et à Salcininkai. Les autorités ont également temporairement fermé l’aéroport de Vilnius à plusieurs reprises la semaine dernière «afin de garantir la sécurité de l’aviation civile» face à ces arrivées de ballons de plus en plus nombreuses. Le fonctionnement de l’aéroport de la capitale avait déjà été perturbé le 5 octobre dernier, quand environ 25 ballons avaient violé l’espace aérien lituanien.

Le Bélarus a de son côté fermement réagi à la décision lituanienne de fermer ses frontières avec le pays, la qualifiant de «provocation destinée à justifier les politiques anti-bélarusses et à étendre les sanctions», rapporte l’agence de presse russe Tass. Le pays, dirigé par l’autocrate et proche allié de Vladimir Poutine, Alexandre Loukachenko, est sous le coup de sanctions américaines et européennes depuis l’invasion de l’Ukraine par la Russie en 2022 à laquelle le Bélarus avait apporté sa contribution. Au mois de septembre, Washington avait allégé ces sanctions après avoir obtenu la libération d’une cinquantaine de prisonniers politiques.

Des «provocations destinées à déstabiliser l’Otan»

Inga Ruginiene a appelé les autorités de Minsk à coopérer pour prévenir de nouveaux incidents de cette nature. Et à adopter «une approche responsable face à ces incidents, indépendamment de nos relations politiques» alors que la Lituanie, membre de l’UE et de l’Otan, reste sensible aux violations de son espace aérien après des incidents impliquant des drones utilisés par la Russie qui ont pénétré sur son territoire depuis le Bélarus en juillet, dont l’un transportait des explosifs.

Le ministre lituanien des Affaires étrangères, Kęstutis Budrys, a ainsi estimé que ces récentes violations de l’espace aérien ne devraient pas être considérées comme des évènements isolés. «Ce sont des provocations calculées désignées à déstabiliser, distraire et tester la détermination de l’Otan», a-t-il publié sur X.

L’espace aérien européen a été secoué à plusieurs reprises dans les dernières semaines, en raison d’observations de drones et d’autres incursions aériennes, notamment au-dessus des aéroports de Copenhague, Munich et dans la région baltique.