L’onde de choc de la dissolution de l’Assemblée nationale, annoncée par Emmanuel Macron dimanche soir une heure après la clôture des bureaux de vote, a été ressentie bien au-delà du sol français. La presse étrangère en témoigne. Dès 21 heures, Der Spiegel signalait dans son direct «un coup de théâtre politique». Le Guardian voit dans cette décision «un énorme pari sur son avenir politique, trois ans avant la fin de son second mandat présidentiel», tandis qu’El Pais décrit «une crise politique aux conséquences imprévisibles» avec «la campagne la plus incertaine de l’histoire récente».
Et pour cause : le parti présidentiel a reçu une véritable gifle électorale à l’issue du scrutin européen dimanche soir. Sa liste, portée par Valérie Hayer, n’a rassemblé que 14,6 % des suffrages. Bien loin derrière les 31,36 % du Rassemblement national. «Avec une participation inédite depuis 30 ans (52 %), c’est la plus large victoire d’un parti aux élections européennes depuis 1984 (où la liste de Simone Veil avait obtenu 43 %), et aussi la victoire la plus visible dans les urnes de Marine Le Pen», rappelle à ses lecteurs le quotidien espagnol El Mundo. Raison pour laquelle Emmanuel Macron a dissous l’Assemblée nationale et convoqué des élections législatives anticipées, qui auront lieu les 30 juin et 7 juillet prochains.
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«Rien n’a pu arrêter la bardellamania», constate-t-on côté belge. Le Soir décrit un Emmanuel Macron très affaibli par sa défaite électorale, contraint de «satisfaire l’exigence» du parti d’extrême droite après le «raz-de-marée» qu’il a obtenu. Mais le journal voit surtout l’organisation d’un nouveau scrutin dans trois semaines seulement comme un coup de poker «très hasardeux» : «Ça passe ou ça casse. Et si ça casse, Jordan Bardella pourra s’installer à Matignon, tandis que Marine Le Pen se préparera pour la prochaine présidentielle.»
«Responsabilité»
Depuis Londres, le ton du Times est un peu plus fataliste, insistant sur le fait qu’à ce jeu-là, le parti présidentiel a «toutes les chances de perdre». Et de rappeler que les conséquences pourront être très rapidement visibles : «La perspective que la France ait un Premier ministre populiste de droite lors de l’organisation des Jeux olympiques cet été est désormais réelle.» Le média espagnol La Vanguardia, analyse quant à lui cette «défaite humiliante» comme une «fragilisation» d’Emmanuel Macron, tant sur le plan intérieur qu’international, pour les presque trois ans de mandat qui restent à courir».
Dans son éditorial, le Franco-suisse Richard Werly ne mâche pas non plus ses mots. Et reproche au président français une «responsabilité qui dépasse les frontières de la France» : «Une victoire de l’extrême droite en France, qui verrait celle-ci revendiquer logiquement l’exercice du pouvoir, ferait trembler l’UE sur ses fondations, prédit-il dans les colonnes du Blick. […] Etre européen veut dire écouter les autres, comprendre ses partenaires, s’adapter à leur rythme et aussi ne pas les prendre en otages de vos décisions et de vos comportements. Cela, Emmanuel Macron ne l’a jamais envisagé.»