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Libération
Témoignage

Didier François, ex-otage en Syrie : «La mobilisation est fondamentale pour les proches»

L’ancien grand reporter à Europe 1 et «Libération» a été enlevé en juin 2013 en Syrie par les jihadistes de l’Etat islamique, en compagnie du photographe Edouard Elias. Détenu pendant près de dix mois, il témoigne à l’occasion des six mois de l’enlèvement d’Olivier Dubois.
TOPSHOT - People hold placard with a portrait of French journalist Olivier Dubois in Paris on June 8, 2021 during a gathering in his support aftre he was kidnapped in Northern Mali in April by a jihadist group with links to Al-Qaeda, according to a video circulating on social media. - Olivier Dubois has worked as a freelance journalist in Mali since 2015, covering the country's jihadist conflict for French weekly Le Point, as well as the left-of-centre daily Liberation. In the undated hostage video published on May 5, 2021, the 46-year-old said he was abducted on April 8 in Gao, northern Mali, by the Group to Support Islam and Muslims (GSIM), the biggest jihadist alliance in the Sahel. (Photo by Lucas BARIOULET / AFP) (LUCAS BARIOULET/AFP)
publié le 8 octobre 2021 à 7h20

«Pendant toute la durée de la détention en Syrie, on était à l’isolement, dans un black-out total. On ignorait tout de ce qu’il se passait en dehors. On n’y pensait même pas d’ailleurs. Mais la mobilisation pour les otages est surtout fondamentale pour les familles, les collègues et les amis. Car en tant qu’otage, on sait ce qu’on vit tandis que les proches restent dans l’angoisse et s’imaginent le pire. C’est pourquoi il est si important qu’ils soient entourés et ne se sentent pas seuls. La mobilisation de toute la société française et les témoignages de solidarité sont très réconfortants pour eux.

«J’ai été bouleversé après ma libération de constater combien des gens tout à fait inconnus s’étaient mobilisés pour nous. J’ai reçu des dizaines de lettres de la part d’écoliers de partout en France. Les enseignants ont sensibilisé leurs élèves en organisant ce genre d’exercice dans leurs classes. C’était vraiment très touchant. Il y a eu aussi les initiatives des artistes qui ont donné des concerts de solidarité. Et puis des mairies qui ont accroché nos portraits sur leurs façades. Résultat, après mon retour, on me reconnaissait dans la rue et les gens se montraient à la fois chaleureux et respectueux de ma vie privée.

«Cette mobilisation de l’opinion a sans doute aussi encouragé les autorités françaises dans leur action. Il faut souligner en effet qu’on a la chance en France que tous nos gouvernements soient toujours prêts à négocier pour sauver leurs ressortissants otages. Ce qui n’est pas le cas pour d’autres pays. D’ailleurs, dans le cas des otages pris par Daech, tous les Français s’en sont sortis, tandis que d’autres ont été égorgés.

«J’aimerais dire enfin qu’il reste essentiel que des reporters continuent d’aller sur les théâtres de conflit pour donner des informations. Sinon on ne saurait pas ce qu’il s’y passe. La prise d’otage est alors un risque bien sûr. Mais un risque qui ne doit pas nous faire renoncer à notre devoir d’informer.»