Chaque mois, des chercheur·ses spécialistes du Sahel livrent leurs réflexions, leurs éclairages, leurs amusements, leurs colères ou leurs opinions sur la région. Aujourd’hui, le point de vue de Bokar Sangaré, doctorant en sciences politiques à l’Université libre de Bruxelles.
Mali, 1994. Deux ans après avoir remis les clefs de l’Etat aux civils après les premières élections pluralistes de l’histoire du pays, le lieutenant-colonel putschiste Amadou Toumani Touré décrit la démocratie comme un concept «importé». En verve dans l’hebdomadaire Jeune Afrique, le parachutiste surnommé le «soldat de la démocratie» – sa légende fleurit toujours – en parle comme d’un «phénomène de mode, un modèle occidental, prêt à emporter», auquel il dit préférer «des systèmes politiques qui ont fait leurs preuves jadis chez nous tels ceux des grands empires».
Ce discours – et ses nombreux avatars – est à la pointe de la mode sur le continent trente ans plus tard. Son talon d’Achille : il est peu soucieux d’appréhender l’histoire de la démocratie en Afrique sur la longue durée et pèche par «l’oubli que [ses] formes sont universelles et plurielles». C’est la thèse forte – non moins polémique – de l’Afrique contre la démocratie. Mythes, déni et péril, ouvrage du journaliste Ousmane Ndiaye, passé par TV5 Monde et Courrier international, qui a tout d’un bélier lancé contre les idées reçues sur la démocratie sur le continent.
Dictature éclairée
En Afrique de l’Ouest, en t