La cérémonie d’investiture de Yoon Seok-yeol à la présidence de la Corée du Sud contraste avec sa campagne électorale. Pas moins de 3,3 milliards de wons (2,5 millions d’euros) ont été dépensés pour une célébration grandiose, organisée devant l’Assemblée nationale, avec des fanfares de l’armée, des soldats, 40 000 invités et une salve de 21 coups de canon. La plus chère de l’histoire.
Yoon Seok-yeol, ancien procureur de 61 ans, novice en politique, a été élu de justesse, le 10 mars, et jouit d’une cote de popularité plutôt faible : 41% seulement, un des plus bas de l’histoire de la démocratie sud-coréenne pour un début de mandat. Même son prédécesseur, Moon Jae-In, classé à gauche, peut se targuer d’avoir 44% à la fin de son mandat.
Conservateur, sexiste, voire antiféministe, le nouveau président sud-coréen n’a pas hésité à multiplier les propos niant les discriminations dont souffrent les femmes dans son pays. Il a d’ailleurs proposé d’abolir le ministère de l’Egalité entre les hommes et les femmes qui lutte contre les violences domestiques et le trafic d’êtres humains, provoquant l’ire des féministes.
«Je lui apprendrai les bonnes manières»
Durant sa campagne, il s’est attelé à prendre le contre-pied de son prédécesseur en ce qui concerne les relations avec la Corée du Nord. Selon lui, Moon Jae-In a plutôt privilégié une politique de dialogue avec Pyongyang, qui n’a conduit ni à la signature d’un traité de paix, ni à une dénucléarisation du pays. Yoon Seok-yeol n’a cessé de s’en prendre à Kim Jong-un tout au long de sa campagne, l’a qualifié de «garçon impoli», et a promis de l’obliger à se comporter en tant qu’adulte, dès son arrivée au pouvoir : «Si vous me donnez une chance, je lui apprendrai les bonnes manières.»
En plus d’adopter une rhétorique belliqueuse, il s’est dit prêt à une frappe préventive contre la Corée du Nord, «si nécessaire». «Les programmes d’armes nucléaires de la Corée du Nord constituent une menace, non seulement pour notre sécurité mais aussi pour celle de l’Asie du Nord-Est. La porte du dialogue restera ouverte afin que nous puissions résoudre pacifiquement cette menace», a-t-il déclaré, après avoir participé à son premier briefing de commandant suprême des armées avec les responsables de l’Etat-major sud-coréen, dans la nuit de mardi à mercredi.
Pendant son discours d’investiture, il a appelé Pyongyang à renoncer à l’arme atomique, en échange d’une aide économique conséquente : «Si la Corée du Nord s’engage véritablement dans un processus de dénucléarisation complète, nous présenterons un plan audacieux qui renforcera considérablement l’économie nord-coréenne et améliorera la qualité de vie de sa population.»
Quinze essais de missiles
Sauf que Kim Jong-un a adopté une attitude de plus en plus belliqueuse depuis le mois de janvier, et a mené pas moins de quinze essais de missiles (incluant des missiles hypersoniques et de moyenne portée), dont deux la semaine dernière. Séoul et Washington le soupçonnent de vouloir reprendre des essais nucléaires. En septembre dernier, l’agence officielle nord-coréenne KCNA avait annoncé que le développement du missile hypersonique apparaît comme l’un des objectifs prioritaires du plan quinquennal pour les armes stratégiques de Pyongyang.
La Corée du Sud possède une capacité d’armements supérieure à celle de son voisin, et a testé avec succès le premier tir d’essai d’un missile balistique lancé par sous-marin (SLBM), en septembre. C’est l’un des rares pays à maîtriser cette technologie avancée. Yoon Seok-yeol a déjà demandé aux Etats-Unis d’augmenter leur présence dans la région et de déployer plus de moyens militaires. 28 500 soldats américains sont présents dans le sud du pays, en vertu du traité de sécurité signé par les deux parties. Le président américain Joe Biden est d’ailleurs attendu dans la capitale sud-coréenne le 20 mai.