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Libération
Contestation

En Iran, vent de colère après la mort de Mahsa Amini, 22 ans, arrêtée par la police des mœurs

La mort d’une jeune femme, arrêtée à Téhéran par la police chargée de contrôler les tenues vestimentaires, a provoqué un mouvement de contestation du régime théocratique.
Un kiosque de Téhéran expose des journaux, le 18 septembre, dont les premières pages contiennent des articles sur Mahsa Amini. (Atta Kenare/AFP)
publié le 18 septembre 2022 à 10h39

Les images, virales, ont fait le tour des réseaux sociaux. Une foule de femmes brandissent leurs voiles au-dessus de leurs têtes, en scandant «Mort au dictateur !», une référence au Guide suprême iranien, l’ayatollah Ali Khamenei. La manifestation, à Saghez, dans le nord-ouest du pays, a été dispersée samedi à coups de gaz lacrymogènes par les forces de sécurité iraniennes.

«Faire preuve de solidarité»

La colère a éclaté après la mort de Mahsa Amini, 22 ans. La jeune femme avait été arrêtée mardi, à Téhéran, par la police des mœurs et l’unité chargée de faire respecter le code vestimentaire strict de la République islamique, dont le port obligatoire du foulard en public. Le motif de son arrestation reste flou. La télévision d’Etat a annoncé vendredi sa mort après trois jours dans le coma. Selon l’agence de presse Fars, elle a été inhumée samedi dans sa ville natale de Saghez, dans la province du Kurdistan.

Plusieurs personnalités ont publiquement réagi après la mort de la jeune femme. Le réalisateur iranien Asghar Farhadi a dénoncé un «crime», selon Associated Press. «Nous appelons les femmes et les hommes du monde entier à faire preuve de solidarité», a réagi de son côté la journaliste et militante politique d’origine iranienne Masih Alinejad.

Morte d’une crise cardiaque

Après ses funérailles, des personnes «ont scandé des slogans en exigeant des enquêtes détaillées sur cette affaire», a précisé l’agence. Les «manifestants se sont ensuite rassemblés devant le bureau du gouverneur» en scandant «d’autres slogans» avant d’être «dispersés par les forces de sécurité qui ont tiré des gaz lacrymogènes».

Vendredi, la télévision d’Etat iranienne a diffusé des extraits d’une vidéo montrant une salle, visiblement au commissariat, où l’on peut voir de nombreuses femmes. L’une d’elles, présentée comme Mahsa Amini, se lève alors pour discuter avec une «instructrice» au sujet de sa tenue vestimentaire, puis elle s’effondre. Dans un autre extrait, le service d’urgence transporte le corps de la femme vers une ambulance. La police de Téhéran a confirmé vendredi le décès, affirmant «qu’il n’y avait pas eu de contact physique» entre les agents de police et la jeune femme. Selon Associated Press, la jeune femme serait morte d’une crise cardiaque.

Une police des mœurs de plus en plus contestée

La présidence iranienne avait indiqué de son côté que le président Ebrahim Raïssi avait chargé le ministre de l’Intérieur d’enquêter sur cette affaire. Le chef du bureau du médecin légiste de Téhéran a déclaré samedi à la télévision d’Etat que des enquêtes sur la cause du décès de la jeune femme étaient en cours mais qu’elles prendraient trois semaines.

En Iran, la conduite de la police des mœurs, qui patrouille dans les lieux publics pour vérifier l’application de la loi sur le foulard et d’autres règles islamiques, est de plus en plus contestée. En 2017, des dizaines de femmes ont publiquement retiré leur foulard lors d’une vague de protestations. Les autorités ont depuis adopté des mesures plus strictes.

Depuis la Révolution islamique de 1979, la loi impose à toutes les femmes le port d’un voile recouvrant la tête et le cou tout en dissimulant les cheveux. Sur les réseaux sociaux, des femmes ont diffusé des vidéos dans lesquelles elles se coupaient elles-mêmes les cheveux, pour protester contre ces règles et en guise d’hommage à Mahsa Amini.