Jusque-là, pour arriver sur le lieu de recueillement, en périphérie du village irlandais de Tuam, dans le comté de Galway, à un peu plus de 200 kilomètres à l’ouest de Dublin, il fallait traverser un labyrinthe de tristes pavillons et un skatepark vide avant de franchir un portillon de fer affublé d’une croix blanche. Le jardinet derrière la grille – une mauvaise pelouse encadrée de murets de pierre grise – était généralement plongé dans un silence de plomb. Entassées dans un coin, sous le regard placide d’une statuette de la vierge sous verre, des bricoles symboliques y perdaient forme et couleur au fil des averses : des chaussures de bébé, des fleurs en tissu, des chapelets, et la liste des 796 noms d’enfants et nourrissons enterrés sous cette herbe.
L’endroit est un des rares vestiges de la maison pour mères célibataires tenue par les «Sœurs du bon secours». Entre 1925 et 1961, les familles et les autorités y ont envoyé les femmes tombées enceintes