Publié dans Libération le 1er février 1990. A 10 heures hier matin, ils étaient sans doute deux à trois mille à être massés devant le grand immeuble de la place Pouchkine. Depuis la sortie du métro (station Pouchkinskaïa), des jeunes gens et jeunes filles en tenue bordeaux coiffés de visières en carton leur avaient distribué des petits fanions. Toutes les télévisions du monde semblaient être là, et même les journalistes ont dû faire la queue pour accéder au «centre de presse» ultrabondé, un petit coin réservé du grand restaurant où, en guise de petit-déjeuner, les Moscovites se sont arraché «Big Mak», «Gamburgers», «Tchizburgers» et «Kartoffel-Fri» (en cyrillique dans le texte). La firme McDonald’s avait pris la place Pouchkine, juste en face de l’immeuble des Izvestia (Les Nouvelles, journal russe), comme son sigle lumineux le criait depuis une semaine en surplombant la rue Gorki de toute son autorité. Pour faire bonne mesure, sur l’immeuble d’en face, Coca-Cola avait aussi déployé ses néons.
«C’est meilleur que nos stalovaïa», fut le commentaire le plus fréquent devant la nouveauté du goût. Une chorale d’enfants, tous assis en rond dans ce qui est le plus grand restaurant de la firme (700 places assises, 200 prévues dehors pour les beaux jours), poussa deux émouvantes chansonnettes une fois les «Gamburgers» avalés.
Des hamburgers payables en roubles
C’est propre, aimable et rapide ; en apparence, le premier McDonald’s implanté en Union soviétique n’a rie