Görlitz, c’est un peu le «monde d’hier» décrit par Stefan Zweig dans ses mémoires, le monde d’avant les nazis. Les ruelles pavées, les églises baroques et les immeubles de la Renaissance attirent chaque année environ 150 000 touristes. En 1945, ce lieu idyllique devait subir le même sort que Dresde, mais il n’a pas été rasé, épargné in extremis par la capitulation du 8 mai 1945.
Quatre-vingts ans après la défaite de l’Allemagne nazie, cependant, la peur de la guerre est revenue à Görlitz. «On voit des poids lourds transportant des véhicules blindés sur l’autoroute A4 en direction de l’Ukraine et des trains chargés de matériels militaires à la gare», raconte le curé de la paroisse catholique, Roland Elsner. «Les fidèles me demandent de quoi l’avenir sera fait», ajoute-t-il.
Görlitz est le symbole de la «Zeitenwende» («changement d’époque») décrété en février 2022 par l’ancien chancelier Olaf Scholz après l’attaque russe contre l’Ukraine. Nulle part ailleurs en Allemagne, le malaise n’est aussi grand. «On ne croyait pas ici que les Russes puissent un jour nous menacer. Certains continuent à le penser», résume le curé.
L’annonce de la reconversion de l’usine de construction ferroviaire en fabrique d’armes a marqué un tournant pour une ville qui fabriquait des trains depuis cent-soixante-quinze ans. Le français Alstom a revendu le site