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Libération
Scandale

Allemagne : soupçonné d’espionnage pour la Chine, l’assistant d’un eurodéputé d’extrême droite arrêté

L’homme interpellé en Allemagne travaille au côté du député européen Maximilian Krah, tête de liste de l’AfD aux prochaines européennes.
Maximilian Krah, tête de liste de l’AfD aux prochaines européennes, le 11 novembre 2023. (DPA/ABACA/DPA/ABACA)
publié le 23 avril 2024 à 12h23

L’affaire pourrait ébranler les élections européennes. A quelques semaines du scrutin, un assistant d’un député européen du parti d’extrême droite allemand AfD a été arrêté outre-Rhin. L’homme est soupçonné d’espionnage en faveur de la Chine, a fait savoir ce mardi 23 avril le parquet fédéral.

L’homme, nommé Jian G., travaille depuis 2019 pour Maximilian Krah, tête de liste du parti pour les élections européennes (du 6 au 8 juin). Arrêté lundi à Dresde, dans l’est du pays, le suspect de nationalité allemande est accusé d’avoir espionné des membres de l’opposition chinoise et d’avoir partagé des informations sur le Parlement européen avec un service de renseignement chinois. L’accusé «avait transmis en janvier 2024 à plusieurs reprises des informations sur les négociations et les décisions du Parlement européen à son client […]», a précisé le parquet dans un communiqué. Ce mardi, le porte-parole du Parlement européen a annoncé la suspension de l’assistant parlementaire. Au vu de «la décision des autorités judiciaires allemandes d’interpeller un individu travaillant actuellement comme assistant accrédité au sein du Parlement européen, et compte tenu de la gravité des révélations, le Parlement a suspendu la personne en question avec effet immédiat», a indiqué ce porte-parole.

Une «attaque contre la démocratie européenne»

Des accusations non négligeables, alors que l’Alternative pour l’Allemagne (AfD) espère doubler son nombre de représentants au Parlement européen. Fondé en 2013 sur un discours antieuropéen, le parti identitaire n’a cessé de progresser dans les urnes, avant de perdre quelques points dans les sondages ces dernières semaines, affaibli entre autres par une enquête du site Correctiv, révélant la tenue d’une réunion conspirationniste entre des néonazis et des cadres du parti.

Malgré une popularité qui s’effrite, l’AfD continue de séduire. Et demeure le deuxième parti le plus populaire d’Allemagne selon les sondages. Selon les résultats de l’Insa publiés début avril, le parti pourrait recueillir 19 % des voix aux élections européennes, perdant 3 points par rapport à février et se plaçant derrière la CDU et la CSU. A l’échelle nationale, la tendance est similaire. Dimanche, un nouveau sondage Insa pour le tabloïd Bild am Sonntag attribuait 18 % d’intentions de vote à l’AfD, contre 22 % au 20 janvier.

Face à ce énième scandale, le parti xénophobe n’a pas tardé à réagir ce mardi. «Comme nous ne disposons actuellement d’aucune autre information sur cette affaire, nous devons attendre la suite de l’enquête menée par le procureur général», a assuré l’AfD depuis Berlin, ajoutant que ces révélations étaient «très préoccupantes». De son côté, la ministre allemande de l’Intérieur, Nancy Faeser, a qualifié l’affaire d’espionnage d’«extrêmement grave». «S’il se confirme que les services de renseignement chinois ont espionné le Parlement européen de l’intérieur, il s’agirait d’une attaque contre la démocratie européenne», a-t-elle déclaré dans un communiqué, peu après l’annonce de l’interpellation du suspect.

Des arrestations en cascade

Des accusations fermement réfutées par Pékin ce mardi, qui a nié tout «prétendu espionnage chinois». «La théorie de la menace d’un prétendu espionnage chinois n’est pas une chose nouvelle dans l’opinion publique européenne», a souligné le porte-parole de la diplomatie chinoise, Wang Wenbin, dénonçant une «calomnie» destinée à «détruire l’atmosphère de coopération entre la Chine et l’Europe».

Ce n’est pourtant pas la première fois que des ressortissants allemands sont accusés d’espionnage pour les services secrets chinois. Lundi, trois personnes ont été arrêtées à Düsseldorf et Bad Homburg, dans l’ouest du pays. Toutes de nationalité allemande, elles «sont fortement soupçonnées d’avoir travaillé pour un service secret chinois à partir d’une date non exactement définie avant juin 2022», a précisé le parquet fédéral.

Des interpellations qui surviennent quelques jours après la découverte d’un projet de sabotage pour le compte de Moscou. Jeudi 18 avril, les autorités allemandes ont annoncé l’arrestation de deux agents russes présumés, soupçonnés d’avoir planifié des actes visant à soutenir le «régime criminel de Poutine» dans sa guerre contre l’Ukraine. Les deux hommes, qui possèdent également la nationalité allemande, avaient cette fois été interpellés à Bayreuth, dans le sud-est du pays.