Coup de théâtre en Slovénie, une semaine après l’Espagne, l’Irlande et la Norvège. Le Parlement du petit pays alpin a voté mardi 4 juin, après moult rebondissements, un décret reconnaissant l’Etat de Palestine, approuvé par 52 voix sur les 90 sièges. La coalition au pouvoir a décidé de passer en force et de rejeter une motion de l’opposition, qui a boycotté la séance – à l’exception d’un député, qui s’est abstenu. Lors d’une séance chaotique de six heures, interrompue à plusieurs reprises pour des raisons de procédure, la motion de l’opposition a donc été rejetée à une large majorité, puis le décret voté.
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Le Premier ministre libéral, Robert Golob, a salué «un message de paix». «La reconnaissance de la Palestine en tant qu’Etat souverain et indépendant est porteuse d’espoir pour le peuple palestinien en Cisjordanie et dans la bande de Gaza», a-t-il écrit sur le compte X du gouvernement. D’après un sondage réalisé en avril auprès d’un échantillon de 600 citoyens et publié par le quotidien slovène Dnevnik, près de 60 % des Slovènes soutiennent cette mesure, tandis que 20 % d’entre eux s’y opposent.
Janez Jansa, l’ex-Premier ministre conservateur proche par le passé du Premier ministre israélien Benyamin Nétanyahou, du Parti démocratique slovène (SDS), a, lui, dénoncé un calcul politique. Selon le texte de sa motion, une telle reconnaissance «cause des dommages à long terme à la Slovénie en soutenant l’organisation terroriste Hamas». La semaine dernière, le gouvernement avait transmis le décret pour approbation au Parlement. L’opposition a dénoncé une procédure accélérée afin d’entériner la décision avant les élections européennes du 9 juin. Janez Jansa a accusé la coalition de centre gauche au pouvoir «d’enfreindre la procédure», quittant l’hémicycle avec les élus de son parti. Le 3 juin, le SDS avait ainsi déposé une proposition visant à organiser un référendum consultatif. Cette manœuvre devait retarder le vote de trente jours en vertu des règles parlementaires. Mais contre toute attente, la présidente du Parlement, Urska Klakocar Zupancic, a estimé mardi que l’opposition avait «abusé du mécanisme du référendum», affirmant que ce délai ne s’appliquait qu’aux projets de loi, et non aux décrets.
Profondes divergences au sein de l’UE
La question suscite par ailleurs de profondes divergences au sein de l’Union européenne. L’Espagne et l’Irlande, toutes deux membres de l’UE, ainsi que la Norvège, ont officiellement reconnu fin mai l’Etat de Palestine, une décision qui a provoqué la colère des autorités israéliennes. La semaine dernière, l’Etat hébreu avait dit espérer le rejet par le Parlement slovène du décret, considéré comme «une récompense pour le Hamas».
Tribune
D’autres Etats membres, comme la France, jugent que ce n’est pas le bon moment. Paris accuse ses alliés européens de «positionnement politique» à l’approche des élections européennes, au lieu de chercher une solution diplomatique. L’Allemagne, qui défend aussi une solution à deux Etats, considère qu’une telle reconnaissance doit être le résultat de négociations directes entre les parties au conflit.
Avant le vote slovène, l’Etat de Palestine était reconnu par 145 des 193 membres de l’ONU, selon des chiffres donnés par l’Autorité palestinienne. La plupart des pays d’Europe occidentale et d’Amérique du Nord, l’Australie, le Japon ou encore la Corée du Sud sont absents de cette liste.