Ils protestaient contre la décision du gouvernement de céder des terres à l’Azerbaïdjan, voisin et grand rival de l’Arménie, dans le cadre de pourparlers de paix. Ce lundi 13 mai au matin, 151 manifestants ont été arrêtés par la police arménienne, alors qu’ils tentaient de bloquer des axes routiers de la capitale, Erevan.
Plus tôt, la police avait évoqué 88 premières interpellations pour «refus d’obtempérer». Toujours selon les forces de l’ordre, aucune rue d’Erevan n’est actuellement bloquée.
Interview
Les autorités arméniennes, en quête d’un accord de paix pour apaiser des décennies de différends territoriaux et de conflits armés avec l’Azerbaïdjan, ont récemment approuvé la restitution de villages frontaliers saisis par leur armée dans les années 1990. Cette décision, perçue par certains comme une concession inutile, a entraîné une marche de protestation depuis la région concernée de Tavouch, au nord-est du pays. L’action a culminé par une manifestation de dizaines de milliers de personnes le jeudi 9 mai. Durant le week-end, d’autres rassemblements ont eu lieu à Erevan.
Avant cela, le gouvernement arménien avait fait face à des semaines de manifestations, certaines bloquant par moments le principal axe nord-sud du pays, reliant l’Arménie à la Géorgie. Le meneur du mouvement «Tavouch au nom de la patrie», Bagrat Galstanian, est aussi l’archevêque de cette région. Il réclame la démission du Premier ministre, Nikol Pachinian.
La délimitation de la frontière en jeu
L’Arménie et l’Azerbaïdjan se sont déjà affrontés dans deux guerres pour le contrôle de la région azerbaïdjanaise du Haut-Karabakh. La première dans les années 1990, remportée par l’Arménie, avait fait plus de 30 000 morts, contre 6 000 pour la deuxième, survenue en 2020 et gagnée par l’Azerbaïdjan.
En septembre 2023, Bakou avait ensuite déclenché une offensive éclair contraignant les séparatistes arméniens du Haut-Karabakh à capituler en quelques jours. Après une trentaine d’années de conflit, l’Azerbaïdjan avait ainsi repris le contrôle de la totalité de ce territoire, scellant une victoire pour son président autoritaire, Ilham Aliev.
Analyse
Dans la foulée, les négociations bilatérales se sont accélérées, sans pour autant aboutir à un accord de paix global entre les deux pays. C’est dans ce cadre qu’Erevan doit remettre des villages conquis aux dépens de son voisin dans les années 1990. Fin avril, les deux rivaux ont notamment entrepris des travaux communs de délimitation de la frontière.
Durant le week-end, des pourparlers ont réuni au Kazakhstan les ministres arméniens et azerbaïdjanais des Affaires étrangères. Grâce à sa manne pétrolière et au soutien de la Turquie, l’Azerbaïdjan se présente largement mieux armé que l’Arménie. Erevan, bien plus pauvre, considère que son allié traditionnel, la Russie, l’a abandonnée face à Bakou. Depuis, le pays s’est davantage tourné vers l’Europe, qui joue un rôle de médiateur dans les pourparlers de paix.