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Conflit

Dans le Haut-Karabakh, l’Azerbaïdjan lance des «opérations antiterroristes», cinq civils tués selon des séparatistes arméniens

L’Azerbaïdjan annonce ce mardi 19 septembre avoir lancé des opérations «antiterroristes» dans la région séparatiste du Haut-Karabakh. Les autorités assurent ne viser que des «cibles militaires légitimes» et proposent des pourparlers. Les autorités séparatistes arméniennes annoncent cinq civils tués.
Vue du village de Taghavard dans la région du Haut-Karabakh, le 16 janvier 2021. (Artem Mikryukov/REUTERS)
publié le 19 septembre 2023 à 13h17
(mis à jour le 19 septembre 2023 à 13h49)

L’Azerbaïdjan annonce ce mardi 19 septembre avoir lancé des «opérations antiterroristes» visant les forces arméniennes au Haut-Karabakh, région que se disputent Arméniens et Azerbaïdjanais et où des détonations ont été entendues dans la capitale Stepanakert. «Des opérations antiterroristes ont commencé dans la région. Dans le cadre de ces mesures, les positions des forces armées arméniennes […] sont mises hors d’état de nuire à l’aide d’armes de haute précision sur la ligne de front et en profondeur», a annoncé le ministère azerbaïdjanais de la Défense dans un communiqué. L’Azerbaïdjan promet de respecter les «droits et la sécurité» des Arméniens de la zone, a déclaré un conseiller du président azerbaïdjanais.

A la mi-journée ce mardi, le Premier ministre arménien s’est lui exprimé dans une déclaration télévisée, évoquant le lancement d’une «opération terrestre» par l’Azerbaïdjan dans la région du Nagorny Karabakh dans le but «d’entraîner l’Arménie dans les hostilités». Le Premier ministre arménien dénonce «des appels venant de différents endroits à mener un coup d’Etat en Arménie», tandis que la télévision arménienne fait état de centaines de manifestants rassemblées devant le siège du gouvernement arménien à Erevan. Des partis d’opposition ont en outre appelé à un rassemblement à 19 heures. Nikol Pachinian a cependant assuré que l’armée arménienne n’était pas engagée dans une «action armée». Il a conclu en rassurant sa population sur le fait que la situation à la frontière arméno-azerbaïdjanaise était, elle, «stable».

Les autorités séparatistes arméniennes de cette enclave ont elle fait état de 5 civils tués et de 80 autres personnes blessées lors de l’opération militaire lancée plus tôt dans la journée. «Des infrastructures civiles sont également prises pour cible» par l’armée azerbaïdjanaise, selon le défenseur des droits de la région séparatiste. Du côté de Bakou, un premier bilan d’un civil tué dans les affrontements a été annoncé par le Parquet azerbaïdjanais.

Une opération condamnée par l’UE, Paris et Washington

Le président du Conseil européen, Charles Michel, a lui aussi réagi à cette résurgence des tensions dans la zone. «Les actions militaires de l’Azerbaïdjan doivent cesser immédiatement pour permettre un dialogue véritable entre Bakou et les Arméniens du Karabakh», a-t-il écrit sur Twitter (renommé X). Le chef de la diplomatie de l’UE, Josep Borrell, a également «condamné» l’offensive militaire de l’Azerbaïdjan dans un communiqué et a réclamé qu’elle cesse immédiatement. Et de mettre en garde : «Cette escalade militaire ne doit pas être utilisée comme un prétexte pour forcer l’exil des populations locales».

De son côté, Paris demande une réunion «d’urgence» du Conseil de sécurité de l’ONU. «Je voudrais souligner que nous tenons l’Azerbaïdjan responsable du sort des Arméniens du Haut-Karabakh», a surenchéri la ministre française des Affaires étrangères en marge de l’Assemblée générale de l’ONU. Le Premier ministre arménien a échangé avec Emmanuel Macron au cours de l’après-midi, appelant à la «désescalade».

Jugeant cette opération militaire «particulièrement dangereuse», selon les déclarations d’un haut responsable américain, le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken va prendre contact avec «toutes les parties», en particulier la Turquie. Moscou a également annoncé vouloir «convaincre» l’Arménie et l’Azerbaïdjan de revenir «à la table des négociations».

La capitale du Haut-Karabakh, Stepanakert, et d’autres villes de la région sont ciblées par des «tirs intensifs», ont déclaré les autorités séparatistes arméniennes. Bakou a précisé avoir informé la Russie et la Turquie de ses opérations dans l’enclave, assurant ne viser que des «cibles militaires légitimes» et non civiles. L’Azerbaïdjan justifie cette opération militaire par la mort de quatre policiers et deux civils azerbaïdjanais dans l’explosion de mines sur le site d’un tunnel en construction entre Choucha et Fizouli, deux villes du Haut-Karabakh sous contrôle de l’Azerbaïdjan. La diplomatie azerbaïdjanaise a assuré que ces explosions révélaient «le principal objectif de l’Arménie qui est de ne pas retirer ses forces armées du territoire de l’Azerbaïdjan», et poursuivre des opérations militaires et de minage.

Groupe de séparatistes arméniens accusé de sabotage

Les services de sécurité azerbaïdjanais ont aussi accusé un groupe de séparatistes arméniens de «saboteurs» pour avoir posé ces mines et commis un acte de «terrorisme». Ils ont également affirmé que les séparatistes arméniens voulaient «aggraver les tensions» dans la région et qu’ils chercheraient à empêcher sa reconstruction après le conflit de 2020, ainsi que le retour de civils azerbaïdjanais déplacés.

L’Azerbaïdjan assure qu’une paix est possible avec l’Arménie en cas de retrait arménien «total» de la région du Haut-Karabakh. En réaction à l’offensive azerbaïdjanaise, le Premier ministre arménien Nikol Pachinian a convoqué son Conseil de sécurité. «L’ordre du jour comprend une discussion sur les actions militaires à grande échelle déclenchées par l’Azerbaïdjan», a déclaré le service de presse de l’organe de défense arménien, cité par les agences de presse russes. Par la suite, l’Arménie a sans surprise dénoncé une «agression» menée par l’Azerbaïdjan à des fins de «nettoyage ethnique». Et d’en appeler aux forces de la paix russes pour «stopper l’agression».

Les tensions avaient pourtant diminué d’un cran lundi avec l’arrivée d’aide humanitaire dans l’enclave, soumise depuis des mois à un blocus azerbaïdjanais qui a provoqué de graves pénuries de nourriture et de médicaments.

Mise à jour à 17 h 50 : ajout du nouveau bilan des séparatistes