La Russie continue de cibler les céréales. Après avoir frappé les ports d’Odessa ces dernières semaines et détruit au moins 60 000 tonnes de céréales, l’armée russe vise désormais les ports du Danube. Dès l’aube ce mercredi 2 août, les sites portuaires ukrainiens de Reni et d’Izmaïl situé à la frontière de la Roumanie, ont été frappés par une série d’attaques de drones. Aucune victime n’est à déplorer, mais les infrastructures sont dégradées. Plusieurs dizaines de milliers de tonnes de céréales destinées à l’exportation ont été touchées. Le procureur général d’Ukraine a indiqué dans un communiqué publié ce mercredi que «les installations portuaires et l’infrastructure industrielle sur le Danube» ont été touchées, endommageant notamment un silo à grains, des hangars de céréales, des bâtiments administratifs et des entrepôts.
«Les Russes ont frappé des entrepôts et des silos à grains, endommageant près de 40 000 tonnes de céréales attendues par les pays africains, la Chine et Israël», a précisé sur Telegram Oleksandre Koubrakov, le ministre ukrainien des Infrastructures.. «Le monde doit réagir», a quant à lui lancé le président ukrainien Volodymyr Zelensky, dénonçant «les terroristes russes (qui) frappent à nouveau les ports, les céréales et la sécurité alimentaire mondiale».
Analyse
Les «attaques continues de la Russie contre l’infrastructure civile ukrainienne sur le Danube, à proximité de la Roumanie, sont inacceptables», a réagi le président roumain Klaus Iohannis sur Twitter, dénonçant des «crimes de guerre». Pour la France, la Russie fait «délibérément» courir un risque à la sécurité alimentaire mondiale «en détruisant des infrastructures essentielles» aux exportations de céréales. «Elle ne fait que rechercher son propre intérêt aux dépens des populations les plus vulnérables en faisant monter les prix des produits agricoles et en essayant d’empêcher un de ses principaux concurrents d’exporter ses productions», à savoir l’Ukraine, a réagi Anne-Claire Legendre, la porte-parole du ministère des Affaires étrangères, dans un communiqué.
La mer Noire, un «pont pour la paix» selon Erdogan
Le président turc Recep Tayyip Erdogan, qui se targue depuis le début de l’invasion russe en Ukraine de parler aux deux parties, a appelé son homologue russe pour lui demander d’éviter toute «escalade» dans le conflit avec l’Ukraine en mer Noire. Il a souligné «l’importance de l’Initiative de la Mer Noire, qu’il considère comme un pont pour la paix», a indiqué la présidence turque dans un communiqué. L’initiative de la Mer Noire est le nom donné à l’accord céréalier signé à Istanbul le 22 juillet 2022 entre la Russie, l’Ukraine, la Turquie et les Nations Unies pour permettre l’exportation dans le monde des céréales ukrainiennes en dépit du conflit en cours. Le 17 juillet dernier, la Russie a refusé de signer la prolongation de l’accord et bombarde depuis les infrastructures céréalières ukrainiennes.
Quant à Vladimir Poutine, il n’a pas hésité à demander à Erdogan de lui apporter son soutien pour exporter les céréales russes et de facto contourner les sanctions occidentales. Au passage, le président russe a maintenu son refus de relancer l’accord céréalier. «Compte tenu des besoins en nourriture des pays les plus nécessiteux, des options sont en cours d’élaboration pour permettre des livraisons de céréales russes […] Il existe une volonté de coopérer dans ce domaine avec la Turquie», a affirmé le Kremlin dans un communiqué, résumant la teneur des propos de Vladimir Poutine.
En juillet, lors d’un sommet entre la Russie et l’Afrique à Saint-Pétersbourg, le président russe avait en outre promis de livrer à plusieurs pays africains gratuitement des céréales, malgré les sanctions qui depuis le début de l’assaut russe contre l’Ukraine paralysent le transport maritime depuis et vers la Russie. Au cours de ce sommet, le président sud-africain Cyril Ramaphosa s’est distingué en affirmant auprès du président russe que les pays africains n’étaient pas venus à Saint Pétersbourg pour demander des «dons» alimentaires mais bien pour lui demander de rétablir l’accord avec l’Ukraine sur les céréales. Une demande rejetée sans surprise par Vladimir Poutine.