Il y a cette animalerie placardée, cet hôtel transformé en épave, ces kiosques abandonnés, çà et là, rappelant une vie qui s’y faisait jadis florissante. Sur cette artère du centre de Pokrovsk, ville du Donbass devenue fantôme, un ciel gris et lourd renforce cette ambiance de misère, au milieu des gravats. Au loin, d’incessantes déflagrations, tel le tonnerre, se font l’écho des violents combats se déroulant à la périphérie de cette ville stratégique du Donbass, dans l’est de l’Ukraine, sur laquelle s’acharnent les troupes du Kremlin.
A Pokrovsk, l’hôpital a fermé, la mairie a déserté, le réseau téléphonique ne fonctionne plus, et les transports en commun sont à l’arrêt. Il n’y reste plus qu’une vie en pointillé, celle de vieillards au pas lourd qui déambulent dans des rues désertes, au milieu d’immeubles balafrés. Ou encore cette silhouette esseulée, enveloppée dans un long manteau noir, au beau milieu de cette chaussée pleine de flaques d’eau. Elle s’appelle Lida, a 74 ans et titube en poussant son landau usé, sur lequel s’amoncellent des boîtes de carton trempées par la pluie, tous ses effets personnels. Le fracas de l’artillerie, au loin, ne la fait guère ciller. «Bien sûr que j’ai peur, mais que peut-on faire ?, lance Lida, qui se plaint de son appartement, endomma